jeudi 20 décembre 2012

Comment bien terminer


Salut à tous,

Tout le monde en parle en ce moment. D'ailleurs ça fait à peu près un an qu'on a commencé à en parler, depuis le film 2012 en fait. Film que j'ai revu avant-hier, sur M6, en VO en plus, une bonne initiative de cette sous-chaîne de télé, à la grille de programme tellement infâme que quand je zappe, je commence à 2 et je passe de 5 à 7 directement.

Mais là, depuis un mois, impossible d'y couper. Toutes les trois secondes, à la télé, sur Tweeter, sur Facebook, n'importe où, y a quelqu'un qui fait une référence à la fin du monde, prévue pour demain. Ceux qui sortent des films disent que c'est pour la beauté du geste, vu que personne pourra y aller. Un comique sur Facebook dit que le club de foot de Brest souhaite que la fin du monde ait lieu avant 20h45 demain, heure de son match contre le PSG. Sans parler de la flopée de reportages à Bugarach,
pour rencontrer les timbrés qui se préparent à échapper au cataclysme en se réfugiant en haut du pic local. Je me demande si, au final, l'afflux de ces dégénérés du bulbe, tant craint par les autorités locales, ne soit finalement surpassé par celui des journalistes venus recueillir leurs si sages paroles...

Bon et bien avec ça, pourquoi je n'aurais pas le droit de m'y mettre, moi aussi ? Moi aussi je peux délirer sur cette prédiction qui n'en est pas une d'ailleurs, puisqu'en fait il ne s'agit juste que de la fin du calendrier maya, rien d'autre. En fait, demain c'est pas la fin du monde qu'on célèbre, c'est le
début de la pénurie de papier en Amérique du Sud il y a 2000 ans.

Jouons notre Bigard. ADMETTONS que les Mayas aient vraiment prédit la fin du monde pour demain, et qu'on ce soit donc ruiné en vain pour les cadeaux de Noël. ADMETTONS qu'on l'ait su, à travers les âges, ce qui n'était quand même pas gagné parce que finalement, à part ça et le dessin animé du même nom, qui parlait d'une abeille il me semble, il ne nous ont pas laissé grand chose, à part quelques croutes architecturales et les maths. ADMETTONS qu'on ait le temps de s'organiser. Dans ces cas-là, qu'est-ce qu'on fait ?

La fin du monde c'est demain, alors à moins qu'elle ne survienne que tard en soirée, difficile de prendre l'avion pour aller passer cet évènement exceptionnel sur une plage haïtienne, avec un cocktail à la main et le corps oint d'huile de coco uniquement recouvert par un léger pagne. Et puis, niveau originalité, vous repasserez, excusez-moi hein. "Oui moi pour la fin du monde, je voudrais être au soleil, dans un endroit paradisiaque, machin..." Perso je trouve que ces endroits là, vaut mieux y vivre que y mourir. Pourquoi gâcher ces endroits par des morts atroces et collectives ? Et surtout, pourquoi ne pense-t-on à y aller que quand la fin semble proche, alors qu'on pourrait en profiter avant ?

En même temps moi je dis ça, mais ces endroits là, ça me branche moyen... ma peau de Viking tolère difficilement l'exposition prolongée au soleil, mon surpoids non plus, et puis à part glander sur la plage, y a pas grand chose à faire d'autre. On se lasse vite quoi.

Moi ce que j'aime, ce sont les temps contrariés, ombrageux, menaçants. Ce que j'aime comme mer, ce n'est pas une étendue d'eau sage, sans remous, transparente, qui ne te réponds pas quand tu viens la voir. J'aime les vagues, j'aime les mers sombres, vertes, mousseuses, qui gardent leur mystère. J'aime les mers si puissantes qu'elles ont remodelé à leur guise les terres qui leurs font face. La Terre ne modèle pas la mer, c'est cette dernière qui taille son chemin, dresse son lit comme elle l'entends. Du moins les vrais mers, l'Atlantique nord, pas le pédiluve méditerranéen ou les mers antillaises ou pacifiques. Ces dernières ne sont agitées qu'en cas de typhon ou de tempête, ce qui ne leur offre pas vraiment l'occasion de modeler quoi que ce soit. Et en plus, dans ces cas là, on ne peut pas se baigner...

C'est dans un endroit comme ça que je veux voir le monde se terminer, dans un paysage qui s'y prête. C'est comme si on tournait le Silence des Anneaux à Disneyland, vous voyez. Ça colle pas.

Il y a par exemple la pointe Saint-Mathieu, après Brest, après Plougonvelin, un endroit où, pendant
des siècles, on a vraiment cru que le monde se terminait ici, enfin après la mer, là-bas, et que seuls les fous ne sauraient tenter d'aller au-delà. Bien sûr, historiquement, quand des conneries sont édictées, l'église n'est jamais très loin, et là encore c'était elle qui s'était chargée du boulot. Il n'empêche que quand vous êtes assis au pied du monument érigé en l'honneur des marins perdus en mer - mais non mangé par des monstres marins, gardiens du bout du monde, enfin je pense - , alors que les embruns vous arrosent le visage et que le vacarme des vagues taillant la pierre en contrebas vous empêcherait presque de penser, difficile d'imaginer qu'il y a quelque chose en face.

Il y a l'Ile de Skye, que j'ai en partie visitée il y a un an et demi, une des plus grandes expériences que ma petite vie a pu engendrer, et qui offre des paysages qui semblent s'être préparés à cette éventualité. Voire même avoir déjà connu la fin du monde. Allez voir mes posts de mars 2011, vous verrez. Les Highlands, le bras d'eau entre ces derniers et Skye, donnent vraiment l'impression que le spectacle s'apprête à débuter, qu'on attends juste les trois coups pour que la pièce commence. Une pièce où, pour une fois, on assisterait au démontage du décor.

Ou alors, en haut d'une montagne. En dehors de mon vertige - ce qui, quand vous mesurez 1m92, pose certains problèmes - beaucoup de choses m'attireraient dans le fait de monter le plus haut possible, pour avoir une vue idéale, ne rien rater. En tournant la tête, on voit un versant, puis l'autre. Par exemple, le col d'Ispéguy, grâce auquel vous pouvez regarder d'en haut la France, puis, en se tournant simplement, l'Espagne. Deux vallées, deux pays, et un spectacle sublime. Bon, y a plus haut que ça, mais vous voyez l'idée.

Vous me direz, ce sont des endroits que je connais déjà, et qui, quitte à utiliser le peu de temps qu'il me reste, autant en profiter pour voir ailleurs, découvrir autre chose. Vous auriez peut-être raison, mais perso je réfléchis autrement. Vous savez, quand je disais que j'aimais parfois écouter 20 fois le même morceau musical jusqu'à épuisement, plutôt que passer mon temps à écouter plein de trucs moyens ? Et bien là c'est pareil. Si je choisi un autre endroit, je cours le risque d'être déçu. Vous imaginez, si je vais admettons, je sais pas moi... au bout de la corne de l'Afrique. Ça doit être sympa là-bas, à part les pirates et la sècheresse... admettons qu'en fait, ce soit tout pourri. Et bien croyez-moi, je serais bien dégouté, et je le ferais savoir. Dans ce cas, je préfère assurer le coup avec un endroit que je sais qu'il me satisfera.

J'adore découvrir des endroits, des choses, je suis très curieux et, je crois, du moins je l'espère, quelqu'un d'ouvert. Mais les endroits inconnus, c'est quand vous avez le temps. Les amateurs de musique classique se mettront certainement dans les feuilles un Beethoven ou un Haendel qu'ils aiment, dont ils sont fous, et n'essaieront pas d'écouter autre chose, si ? T'imagines, tu crève sur un Verdi tout pourri, comment t'as raté ta mort ? La découverte, c'est quand vous prenez le risque d'être déçu, en vous disant que si c'est nul, et bien vous irez ailleurs, c'est pas grave. Là, dans notre situation présente, c'est votre dernier voyage, y en aura pas d'autre après. Moi perso, je veux pas prendre ce risque, donc j'irai dans un endroit que j'aime, que je connais, et où je sais que la vue me rendra heureux. Je veux en avoir plein les mirettes, et ce, autrement que par la luminosité solaire. Les pierres, l'eau, voilà ce qui me fait triper.

Bon j'ai trouvé l'endroit, l’Écosse, la Bretagne... mettons l’Écosse, ça fait un voyage en plus. Je débarque demain en fin de matinée (le vol dure 1h30). Bon ok, je serais parti très tôt demain matin, m'embêtez pas. Tout ça en compagnie de mon Amour, évidemment, si elle est d'accord du moins. Je suis à Édimbourg - Edimbrrrra - , je file dans un pub me faire un méga petit dej local. La version large, quoi. Hors de question de mourir avec un petit creux, ça porte malheur. Notez que les petits
creux, ça m'arrive rarement. les gros, un peu plus. Bref, je m'enfile mes saucisses, mes toasts, mes oeufs brouillés, la totale quoi. Déjà, je touche le paradis du bout des doigts. Si j'ai le droit à l'enfer ou si il y a rien après, comme prévu, ce sera toujours ça de gagné.

Puis je prends un bus (non je ne loue pas de voiture, hors de question de conduire à l'envers, ce serait très con de mourir à quelques heures du cataclysme), direction Inverness et les Highlands, puis l'Ile de Skye. Avant, j'aimerais juste voir le château écossais que je n'avais pas pu visiter la dernière fois, le Dunottar Castle, sur la côte est. Ensuite, direction le Loch Ness, dont je suivrais la ligne droite sans le quitter des yeux, comme la dernière fois. Arrivé au sublissime Eilean Donan Castle, je m'arrêterais un peu à son pieds, si la fin du monde me le permets. J'espère qu'on sera en fin d'après-midi, pour la luminosité parfaite. J'espère aussi qu'il n'y ait personne d'autre que nous. Ben quoi, ils sont pas sensés être partis au soleil les gens ? Laissez mon Écosse tranquille, merde !

Et enfin l'Ile de Skye. J'irai voir les Skye Mealt Falls, cette chute d'eau venant de nulle part et nourrissant la mer entre l'Ecosse et son île mythique depuis la nuit des temps, et le Kilt Rock qui l'accompagne. J'admirerais les montagnes, qui abritent si parfaitement le cycle naturel de l'eau, avec ses milliers de petites cascades. Je me poserais là, quelque part sur cette côte, et j'attendrais le début de la représentation.

Vous savez quoi ? Ça me donnerait presque envie que cette vaste fumisterie soit réelle.

Je vous laisse.

2 commentaires:

Manue a dit…

Elle est belle ta fin du monde, je t'accompagnerais bien :)

Damien a dit…

Bon, franchement, arrête un peu avec ton Ecosse, t'es gonflant !!

Bah oui, maintenant, ça fait encore un autre voyage à faire, on s'en sortira jamais !! :))