Affichage des articles dont le libellé est Médias. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Médias. Afficher tous les articles

mercredi 17 juin 2015

Assassin's Creed Evolution

Salut à tous,

Il y a 14 mois, je vous révélais et décrivais ma toute récente passion pour la série de jeux vidéos historiques "Assassin's Creed", ici. Depuis, de l'eau a coulé sous les ponts de Venise. A l'époque, j'étais sur le point de terminer le III, c'est-à-dire le cinquième opus de la franchise (ça m'amuse toujours), depuis je l'ai terminé... cinq fois. Et ses prédécesseurs, 3 fois chacun, hormis Liberation. Et je viens de terminer le suivant, Assassin's Creed IV Black Flag, celui ou le héros assassin est un pirate durant l'âge d'or de la piraterie, vers 1718-21, avec Barbe Noire et compagnie. Et j'attends pour demain les deux qui suivent, Rogue et Unity, celui qui se déroule sous la Révolution à Paris. Oh oui, j'ai beaucoup de temps à perdre, je sais.

Il faut syn-chro-ni-ser


Ce qui est bien avec ces jeux, c'est qu'à chaque fois je découvre de nouvelles choses dans chaque jeux. Une multitude de petites missions qui s'ajoutent au scenario principal, qui nous permettent souvent de gagner des objets utiles comme des armes spéciales ou des armures. Et surtout, ça permet d'étirer la durée du jeu, qui ne durerait qu'une demi douzaine d'heure, peut-être, autrement. Je vous avais dit que j'avais terminé Revelations, celui que j'avais commandé sur Amazon et qui se déroule à Constantinople au début du XVIe siècle, avec un Ezio Auditore certes vieillissant mais toujours capable de sauter de la Tour de Galata pour atterrir dans un tas de foin, plus de 60 mètres plus bas, en cinq petits jours. Normal, j'étais tellement obnubilé par la trame principale, histoire de savoir la suite, que j'avais zappé une palanquée de petites missions pourtant super intéressantes. Du coup, je suis passé de 53 % de "synchronisation" (à quel point on a terminé le jeu, en gros) à plus de 80.

Ah oui parce qu'à partir du II, avec le début des aventures italio-turques d'Ezio, y a le challenge de la synchronisation qui pimente un peu le tout. En gros, quand vous avez une mission à faire, un type à zigouiller ou à voler ou espionner, bref un truc à faire, le jeu vous donne une ou plusieurs tâches optionnelles pour que ce soit encore plus fun, que ce soit un peu plus dur mais aussi plus gratifiant quand on y arrive... Exemple, il faut assassiner quelqu'un, et bien ils vous demandent en plus de passer inaperçu et d'effectuer un assassinat aérien (du haut d'un toit, en sautant sur votre victime). Vous n'êtes pas obligé de faire tout ça, si vous rentrez dans le tas, tuez tous les gardes et votre cible comme un bourrin, vous ne perdez pas. Simplement, si vous y arrivez, vous "synchronisez" plus, et ça s'ajoute à votre synchronisation totale. Si vous remplissez les objectifs optionnels, vous aurez 100 %. Sinon, vous aurez entre 50 et 90, selon les jeux. Du coup, les premières fois que j'ai joué à chaque jeu, je faisais des synchronisations merdiques. Depuis, à chaque fois que je joue, je m'améliore vachement. Mais je serais curieux de rencontrer quelqu'un qui a déjà fait un total de 100 % sur tout un jeu... il y a des objectifs optionnels qui sont impossibles à réaliser, tout simplement.

Bref, si j'avais encore des gens qui s'intéressaient à ça par politesse ou parce qu'ils m'aiment bien, je les ai perdu avec ça. En fait, je voulais surtout parler de l'évolution des personnages depuis le premier opus, qui était finalement très binaire, même si ça reste un excellent jeu. Mais ses enfants le surpassent en tous points.

Altaïr, la simplicité même

Dans le 1, qui, rappelez vous, se déroule en Terre Sainte durant les Croisades, on dirige un personnage qui se révèle être finalement l'assassin ultime, la base, celui qui inspire tous ses successeurs par sa pureté et son absolue "assassinitude". Fils d'un Assassin, élevé par des
Assassins dans une forteresse (qui existe vraiment, ici) défendue par des Assassins, il aurait eu du mal à échapper à sa vocation. Même si ce fut un peu le rebelle de l'Ordre à l'époque, il en devint tardivement le mentor pour mourir très très âgé assis tranquillement enfermé dans la bibliothèque de la forteresse. C'est le seul à mourir vieux et de sa belle mort d'ailleurs... quoique Connor, on ne sait pas ce qu'il est devenu.

Comparé à ceux qui vont lui succéder durant la Renaissance ou le XVIIIe siècle américain, son équipement restera extrêmement binaire. Altaïr, c'est une toge blanche et sa capuche - qu'on ne voit jamais baissée, c'est d'ailleurs le seul dans ce cas -, une lame secrète cachée dans sa manche gauche, une épée et des couteaux de lancers. Des boutiques pour changer la couleur de sa tunique ou acheter des armes et des armures ? Y en aurait qu'il ne pourrait pas s'y équiper, vu qu'il n'a pas d'argent, là aussi c'est le seul dans ce cas. Tous les autres passeront leur temps à chercher des coffres remplis d'argent, en gagneront souvent en remplissant des contrats d'assassinat ou en détroussant les passants (pas très moral, mais très utile quand même), surtout Ezio, un spécialiste. Du racisme anti Italien, peut-être... mais Altaïr c'est un pur, un ascète, il n'est pas concerné par nos basses préoccupations pécuniaires, tout ce qui l'intéresse c'est de remplir ses missions et éliminer ses cibles.

Avec Ezio, tout s'emballe

En partant d'Altaïr, les créateurs du jeu ne vont cesser de chercher à imaginer des armes, des armures, qui vont nous permettre de nous régaler encore plus. A partir d'Ezio, déjà, on peut effectuer des assassinats aériens - du haut des toits, je l'ai déjà évoqué - ou à partir de cachettes - tas de foins, bancs, rebords de toit... - mais on pourra aussi... plonger dans l'eau et nager. Oui parce qu'Altaïr mourrait quand il tombait dans l'eau, ce qui était rare mais ça arrivait. Une bizarrerie qui s'appliquera d'ailleurs aux méchants qui nous poursuivront dans tous les autres opus, sauf Black Flag, ce qui nous permettra à coup sûr de nous sauver en plongeant et en nageant hors de portée des fusils. Dans Black Flag ils peuvent nager, mais nous perdent de vue à chaque fois donc...

Celui qui se régale le plus, c'est Ezio. D'abord parce qu'il est pote avec Leonardo da Vinci, et ce qui est bien avec Leo c'est qu'il a plein d'idées géniales. Il nous fabrique donc une lame secrète qui tire des balles, une deuxième lame secrète dans l'autre manche - tous les autres
auront également les deux lames, ce qui nous permettra de tuer deux gardes à la fois - des parachutes pour sauter des immeubles quand personne n'aura eu l'idée d'abandonner sa charrette de fois en contrebas, un gant de métal pour pouvoir mieux escalader, ainsi que sa fameuse aile volante qui nous permet d'effectuer un vol légendaire au-dessus de Venise jusqu'au palais du Doge, dans ce qui demeure une de mes scènes préférée de toute la série, avec l'aide d'une musique qui fait planer, ici. Mais bon ça c'est que dans deux missions au total.

Par ailleurs, avec l'apparition de l'argent, les boutiques - qu'il faut libérer et acheter dans Brotherhood, le suivant, qui se passe à Rome, puis dans Revelations, celui à Constantinople - nous permettent de nous fournir en armures et en armes. On peut acheter du poison, des glaives, des haches, des arbalètes et les fameuses bombes fumigènes qui peuvent nous permettre de nous échapper d'un combat mal embarqué. Ça par exemple, je m'en servais très peu les premières fois où j'y jouais... et puis bien sûr des armures, sauf pour la tête, parce que bon ça va pas avec la capuche. Sur la fin des trois jeux avec Ezio, on ressemble plus à un chevalier qui aurait perdu son heaume qu'à Altaïr, on se demande même comment on arrive à être toujours aussi altier sur les toits...

C'est peut-être pour ça qu'à partir des opus suivants, avec Connor Kenway durant la révolution américaine (Assassin's Creed III, le dernier sans nom ajouté au titre) puis avec son grand-père Edward, le pirate (Assassin's Creed IV Black Flag, le dernier avec un numéro dans son nom), on n'aura plus d'armures, autres que celles, légères ou même réduites à un anneau magique qui détourne le métal, donc les balles, qu'on gagne en réussissant une série de missions optionnelles. On peut changer leurs tenues, notamment la couleur, mais c'est tout. De toutes façons, ces deux là, contrairement à Ezio qui passait son temps à courir les médecins pour rétablir ses points de vie perdus suite au combat ou aux mauvaises chutes, n'en ont pas besoin : hors combats, leur jauge de vie remonte automatiquement... comme leur aïeul Altaïr. Vachement pratique, fini le trou de la Sécu avec ça.

Edward, Assassin pour la forme

En revanche, époque oblige, on est (enfin !) équipés de pistolets. Ok c'est pas franchement des automatiques, il faut un certain temps pour les recharger entre chaque coup, mais c'est quand même assez kiffant. Surtout que Edward, lui, peut en porter jusqu'à... quatre, ce qui lui permet de nettoyer des ponts de bateau en un éclair...

Tiens Edward, justement, le seul et unique Assassin blond, le Daniel Craig d'Assassin's Creed. La dernière fois, j'en étais à la fin du III, et en attente de pouvoir acheter le IV, dont on m'avait dit qu'il était peut-être un poil décevant. Alors oui, la trame principale est loin d'être aussi dramatique que celle du III (où on dirige d'abord Haytham, le fils d'Edward et
Templier notoire, puis Connor, le petit-fils semi Mohawk, qui tue son père à la fin parce que bon, c'est un Templier) et c'est vrai qu'au niveau évènements historiques, l'époque des pirates c'est sympa mais pas non plus palpitant. Je connaissais Barbe Noire de nom, comme tout le monde je pense, mais j'ai aussi découvert - merci Wiki - l’existence de plein d'autres de ses congénères comme Benjamin Hornigold ou les femmes pirates (déguisées en homme) Anne Bonny et Mary Read. Mais bon, on est loin des Borgias ou des batailles de la Révolution américaine...


Mais le jeu est un kiff total. Edward, en bon pirate, se bat avec deux épées, en plus de ses quatre pistolets. Il a aussi une sarbacane pour envoyer des fléchettes qui rendent fou ou endorment, et bien sûr des bombes fumigènes. Et là on se souvient de l'antique Altaïr et sa petite lame cachée... ce qui est intéressant avec ce personnage, c'est que c'est l'opposé absolu d'Altaïr, justement, mais aussi de son futur petit-fils, Connor. C'est l'anti Assassin - d'ailleurs, tout au long du jeu, c'en est pas vraiment un. Il le devient - un peu - sur la fin, quand il a à peu près tout perdu, tout ceux qu'il aimait en tous cas, et qu'il se rend vraiment compte que les Templiers sont vraiment des empaffés qui veulent contrôler l'Humanité. Mais dès qu'il a éliminé sa dernière cible, il quitte les Assassins des Caraïbes pour retourner à Londres élever la fille dont il vient de découvrir l'existence.

Jusque là, je l'ai dit, c'est un pirate. Et pas un gentil, non : il est plus tendance Barbe Noire que Johnny Depp, si vous voyez ce que je veux dire. Assoiffé d'alcool, déjà, mais surtout d'argent et de gloire, il ne cesse de refuser les appels du pied des Assassins, qui voient en lui une recrue potentielle de qualité. Au début il côtoie même les Templiers - sans rien savoir de leur nature, ni de celle des Assassins d'ailleurs - avant de les défendre contre leurs ennemis millénaires encapuchonnés, en tuant plusieurs. Autant dire que sa carrière de futur Assassin avait du plomb dans l'aile.

Quand on joue à Black Flag, on passe un temps infini en mer, à la barre du Jackdaw, le navire d'Edward. On attaque des navires - pas des particuliers, rassurez-vous, l'honneur est sauf - remplis de soldat, mais surtout de sucre, de rhum et autres denrées qu'on peut revendre ou exploiter pour obtenir des objets ou améliorer le bateau. On explore des épaves sous-marines en essayant d'éviter les requins, les murènes, les oursins, les méduses... les combats navals, qu'on avait déjà effleuré dans le III avec Connor mais quasiment que dans des missions secondaires, sont nettement plus développés et beaucoup mieux foutus, c'est juste un bonheur. Bref, on a jamais été aussi éloigné du monde des Assassins, même si le jeu est aussi rempli de missions d'infiltrations, les plus difficiles qui soient, qui ont fait la légende de la franchise.

Malgré tout, et ça on le lit dans le livre (oui j'ai lu deux des livres dédiés au jeu...), il enseignera à son fils Haytham les principes des Assassins, avant de mourir, trahi par un "ami" templier, alors que Haytham n'a que dix ans. Ce dernier sera "récupéré" par le meurtrier de son père et deviendra donc un Templier lui-même. Ainsi, la lignée Kenway est bouclée...

Rogue et Unity, la fin de la boucle

Elle sera vraiment complétée dans Rogue, qui se déroule après Black Flag, et parallèlement au début du III, lorsque Haytham, qui est devenu le Grand Maître des Templiers aux Amériques, chasse les Assassins pour les éliminer, après qu'il ait rencontré sa compagne Mohawk avec qui il aura eu Connor - sans qu'il le sache, d'ailleurs. Dans Rogue, on contrôle un Templier, pour la première fois sur toute la durée d'un jeu, après avoir dirigé Haytham durant les trois premières séquences du III, et ce sans le savoir. Sauf qu'au début, Shay Cormac, le héros de Rogue, est un Assassin, mais qui tourne du mauvais côté après qu'il se soit senti trahi par les Assassins, et rejeté. Il deviendra alors le chasseur d'Assassins d'Haytham, avec un grand succès. Il a d'ailleurs de bonnes raisons de s'attaquer à sesanciens collègues, mais ce serait trop long à vous expliquer. Cet opus explique aussi un élément qu'on survole dans le III, à savoir comment les Assassins ont été décimés dans les années 1750-60, et comment le vieux maître de Connor, Achilles Davenport, est devenu ce qu'il est devenu : un vieux boiteux désabusé et plein d'aigreur, qui retrouvera gout à la vie grâce au jeune Connor. C'était lui le mentor des Assassins lorsqu'ils ont été décimés, et il sera épargné par Cormac au moment ou Haytham s'apprêtait à l'achever. Vu comment l'apprenti d'Achilles, son propre fils, mettra finalement fin à sa vie 20 ans plus tard, il aurait mieux fin de ne pas écouter Cormac...

Oui je sais tout d'un jeu auquel je n'ai pas encore joué... disons que je me suis... renseigné.

Par ailleurs, Rogue lance aussi l'autre opus de l'an dernier, Unity, celui de la Révolution, puisque c'est Shay Cormac, des années plus tard, qui assassinera, à Versailles, le père du héros de Unity, un Assassin. Unity dont je sais moins de chose, mais où j'espérais vraiment retrouver Connor, qui est un personnage exceptionnel, plein de contradictions et de luttes intérieures, et qui se bat avec un tomahawk, ce qui n'est pas un petit kiff non plus. Surtout, dans le III il discute longuement avec La Fayette, qui lui promets de le faire venir à Paris dès que possible. Et puis c'est le seul héros de la série dont on ne sait absolument rien de sa vie après son aventure du III, comment il évolue, comment il meurt... et il n'aurait eu qu'une trentaine d'années au moment de la Révolution, les auteurs ont fait pire avec Ezio. Je trouve dommage qu'ils aient complètement abandonné ce personnage plein de potentiel, comme Altaïr. On le voit juste apparaître lors d'une mission dans "Liberation", le jeu édité par les studios bulgares et sorti à la même époque du III, durant lequel on dirige une femme dans la Nouvelle-Orléans des années 1760, et dans le bayou. C'est le moins bon opus de la série, que j'ai terminé qu'une fois et que j'ai du mal à accoler au reste de la série, parce que bon... il n'a pas un grand intérêt au final, sur le plan historique et dans la trame générale de la franchise.

Bref voilà, la longueur de ce post s'explique par la hâte que j'ai de recevoir Unity et Rogue, dès demain normalement... je n'ai pas fini de me coucher à 3h du mat...

Je vous laisse. Requiescat in Pace !

jeudi 8 janvier 2015

Où est Charlie ?

J'irai bien faire un tour au Brésil encore aujourd'hui, mais je dois parler d'hier.

Pourtant rarement j'ai eu autant de mal pour poser des mots sur ce que je ressens depuis une trentaine d'heures maintenant. Branché, vissé à iTélé, je scrute mon écran pour savoir quoi penser, essayer de comprendre pourquoi le monde, telle une balançoire défaillante, un peu bancale, un peu rouillée, se met tout d'un coup à nous envoyer dans le décor, alors qu'on demandait juste à fendre tranquillement l'air, en tendant les pieds vers l'avant, puis vers l'arrière. Pourquoi, une fois par décennie, tout craque, les coutures du rideau cèdent et nous laissent entrevoir le côté sombre de la petite comédie que notre société nous joue pour nous donner l'impression que nos existences ont un sens. Pour nous faire croire que le seul but dans la vie, c'est de se lever tôt pour aller trimer pendant quarante ans, histoire de pouvoir se payer un beau cercueil. Des fois, des évènements soulèvent le voile et nous montrent combien tout cela est du vent, combien tout cela est dérisoire. Comparé à l'essentiel, à savoir la vie, et son infinie fragilité.

On est habitué à entendre aux infos que des gens sont morts. Des vieux, parce qu'ils n'avaient plus d'essence, des soldats, parce que leur métier est de risquer leurs vies, des otages, parce que des gens leurs ont déjà volé une partie de leur existence et les privant de liberté, des quidams dans des accidents, parce que la vie sélectionne arbitrairement, comme ça, au hasard, en fermant les yeux et en pointant du doigt des malchanceux. Ça nous attriste, ça nous touche, on se dit "oh merde, c'est dingue ça", parce que voilà, c'est moche de mourir, mais ça ne nous détourne pas vraiment quand même du déroulé de nos vies à nous, qui ont l'audace de continuer. Est-ce que vous êtes restés prostrés devant votre télé quand Robin Williams ou Joe Cocker sont morts ces derniers mois ? Pas sûr, non. Ce sont des chapitres que l'on clôt, tout au plus. Dans une poignée d'années, on essaiera de se rappeler, en vain, de l'année de leur décès. Parce qu'aussi déplorables soient-ils, ils se seront noyés dans l'océan des nouvelles tristes qui ponctuent nos journées de camés de l'info.

Non, là c'est différent. Ces sont des gens qui devraient mourir comme leur aîné Cavana, vous savez, vieux, avec une grosse moustache et un air fripon, un mélange entre le vieux con et le nostalgique de mai 68. Tranquillement, de vieillesse, à sa table à dessin, devant un western, en écoutant du jazz, que sais-je. Une mort paisible, après avoir agité pendant tout une vie les consciences et les intelligences avec des dessins ou des textes brillantissimes, insolents, après avoir passé des décennies à décrire des époques différentes, des gens différents, les ridiculiser, les parodier, à ne trembler devant personne, parce que pourquoi trembler ? On a beau dessiner la bite de Hollande, il ne va rien nous arriver de grave non ? Un contrôle fiscal, à la rigueur... Vu qu'on vit dans un pays terriblement libre, on s'en rend paradoxalement compte alors même que la liberté a pris un autobus dans la gueule hier, le dessinateur le plus insolent qui soit ne peut risquer sa vie pour ses œuvres, normalement. Pas vrai ?

Mais non, eux sont morts comme à une époque révolue, qui n'a pu exister que sous l'occupation ou, avant cela, sous les rois ou les empereurs. A l'époque où La Fontaine devait ruser en utilisant des animaux pour se moquer du roi. Même sous De Gaulle et son ORTF, et son ministère de l'information bouclé à double tour, il y avait des caricatures. D'accord, Hara Kiri avait été fermé après sa une "bal tragique à Colombey, un mort", le lendemain de la mort du Général. Mais les dessinateurs qui y travaillaient s'étaient retrouvés au chômage, pas étendus sur le sol de leur salle de rédaction, criblés de balles. Ce sont des actes, des images de temps non pas révolus, mais carrément anachroniques. Comment est-ce possible ? Qu'est-ce que ça veut dire ?

Ce genre d'évènements changent le monde, et souvent on peu deviner ce qui va se passer ensuite. Le 11 septembre, par exemple, on a tout de suite senti que deux civilisations allaient se retrouver face à face, et que même si on savait qu'on ne devait pas céder aux instincts les plus bas, ça n'allait pas aller mieux sur ce plan. Et, de fait, la défiance et la haine à peine voilée entre l'occident et le moyen-orient n'a cessé de monter depuis plus de 13 ans. Pour aboutir à ça. Parce que c'est ça, aussi. Ce massacre à Charlie Hebdo, c'est une des balles perdues du carnage de Manhattan. Le monde dans lequel on essaie de nager est l'enfant de cette rencontre terrible de l'automne 2001, entre un occident débarrassé depuis une décennie de la menace soviétique et qui se croyait enfin seul au monde, et des fondamentalistes islamiques qui sentaient qu'il y avait une place à prendre en face du grand Satan.

Peut-on mesurer l'ampleur du désastre ? Cinq des meilleurs dessinateurs de France ont disparus du paysage, parmi les plus féroces, les plus talentueux, les plus mythiques aussi. Charb, Tignous, Honoré, ce n'était pas rien déjà. Mais Cabu et Wolinski... excusez-moi mais là, c'est encore plus terrible. Comment imaginer que l'éternel Wolinski, le fabuleux Wolinski, comment concevoir que le génial Cabu, comment ces mecs là qui dessinent la France et sa société sous toutes leurs coutures depuis cinq ou six décennies, depuis les époques De Gaulle ou Pompidou, avant le net, à l'époque des trois chaînes, avant que les femmes puissent ouvrir un compte en banque sans demander l'autorisation à leur mari, depuis toujours quoi, merde, comment ces mecs là ont pu finir leurs vies sous les balles de deux abrutis encagoulés et embrigadés ?

Je sais qu'une vie en vaut une autre, et que les autres, celles des policiers, celles des inconnus qui sont également tombés hier, méritent également tous les honneurs. Mais pour moi, hier, on a assassiné Coluche six fois, tout simplement. Les cinq dessinateurs et Bernard Maris, le chroniqueur de France Inter. Je vais me faire tuer par mes amis indécrottables optimistes, qui ne veulent voir que le positif - alors qu'ils ont pourtant plein de raisons, plus que moi, même, de sombrer dans la dépression parfois - mais les pessimistes ont raison, le monde ne va pas dans la bonne direction. Je cherche désespérément une nouvelle, la nouvelle, qui me ferait croire en un avenir meilleur. Les rassemblements spontanés ? Oui c'est beau, c'est magnifique, et ça prouve qu'une partie de la population, au moins, est encore dotée d'une conscience et d'un amour pour la justice. Et ça va inciter pendant quelques temps - une semaine ? Plusieurs ? - la classe politique à s’afficher unie et solidaire. Comme si la France pouvait fonctionner comme ça sur la durée. Mais même ça n'est pas vraiment souhaitable, pour le débat démocratique. Un monde où tout le monde serait d'accord ? Il n'y aurait plus de Charlie Hebdo alors.

Non, cet évènement va provoquer ce qu'on peut déjà poindre à l'horizon, et même plus près que ça, dans les insinuations de l'extrême droite et de la Droite Forte, quand ces tristes sires évoquent notre "civilisation" attaquée, quand la mère Le Pen parle déjà de retour de la peine de mort alors que les corps de Cabus et ses collègues ne sont pas encore refroidis après avoir insisté lourdement sur le caractère islamiste de l'attentat, quand Dupont-Aignan, dans les instants qui ont suivi le massacre, réclamait la fermeture des frontières... on y va tout droit, à l'étape suivante. Le Pen au deuxième tour ? Des mairies FN ? De la roupie de sansonnet. Une grande partie du pays réclame du populisme, peu de réflexion, beaucoup d'action, quelle qu'elle soit. Elle veut de la force, elle ne veut pas savoir pourquoi ni comment, juste quelqu'un qui donne l'impression de la guider. Oui, une partie de la France est ouvertement raciste, on ne peut plus aller dans un commerce, sur un forum, lire des commentaires, sans croiser un livre là-dessus, des propos là-dessus. C'est partout, c'est étouffant, c'est omniprésent. Et la catastrophe d'hier va précipiter tout ça. Comment croire que le peuple va renouveler sa confiance en Hollande ou en Sarkozy ? S'il n’écoute pas Mélenchon - il devrait -, il écoutera Le Pen. Et là, mes amis, tous aux abris.

Je vous laisse. RIP Charlie.

dimanche 12 janvier 2014

Dehors les fachos

Salut à tous,

Juste après vous avoir sincèrement souhaité une très bonne année, je vais aborder un sujet qui montre que cette bonne année, ben elle est pas vraiment gagnée. Comme celles d'avant d'ailleurs, que le déluge de souhaits en bonheur et en bonne santé qui l'ont inauguré n'a pas influencé en quoi que ce soit sur leur taux de bonheur. En tous cas sur le plan général.

Oui, moi aussi je m'y mets, à parler de Dieudonné. Parce que le côté particulier, clivant, de cette affaire oblige presque tout le monde à choisir un camp. Dans sa chanson "Leisenstadt", qui se demande notamment comment on a pu en arriver au nazisme dans les années 30 en Allemagne, J.J.Goldman souhaitait "si possible très longtemps à ne pas avoir à choisir un camp". Et depuis des années, même après la montée et la dé-diabolisation de la parole raciste en France grâce aux bons offices de Sarkozy et de ses roquets, on y avait à peu près échappé. Ça fait un petit moment maintenant que la France n'a plus été confrontée à l'obligation de choisir un camp sur le plan moral, de cette manière ; le référendum de 2005 sur la constitution européenne de Giscard, qui a profondément marqué la fracture entre les Français sur l'Europe et ses dérives, était plus un choix politique que moral, même si les partisans du oui ont caricaturé leurs adversaires, dont je faisais partie, en les faisant passer pour des anti européens primaires, voire des souverainistes. Ça faisait beaucoup d'électeurs potentiels pour de Villiers, mais peu importe.

Que faire d'autre ?

Pourquoi on s'est mis à parler soudainement de Dieudonné pendant les fêtes alors que ça fait dix ans qu'il a définitivement abandonné le costume d'humoriste pour celui de tribun antisémite, je ne sais pas, j'étais pas là, j'étais en Bretagne avec mes amis. Comme pour beaucoup de gens, donc, cette affaire est apparue soudainement, et comme souvent pendant les congés, les gens découvrent ça à leur retour avec effarement. Ce qui a sans doute déclenché tout ce toutim, c'est ce que Dieudonné a dit dans son spectacle à propos de Patrick Cohen, le journaliste de France Inter, et sur le fait que, je cite, "les chambres à gaz... dommage". Mouarf, hilarant ! Il ne faut surtout pas l'interdire, il est trop drôle ! C'est de l'humour, bien sûr !

On accuse Manuel Valls de lui avoir fait de la pub, et de l'avoir conforté dans son rôle favori, comme c'est le préféré, depuis toujours, de l'extrême-droite dans tous les pays de la terre, celui de victime du système et d'un complot, quel qu'il soit, même s'il est souvent juif, à les entendre. Argument indiscutable et recevable. Mais qu'aurait-il fallu faire d'autre ? Ne rien faire parce que sinon il passe pour la victime, le laisser vomir sa haine sur scène, ce qui lui permet de toujours se faire passer pour un comique ? Naulleau et consort me sortent qu'il faut simplement appliquer la loi, là encore je suis d'accord. Mais c'est ce qui se passe actuellement ! Interdire les manifestations xénophobes, racistes et antisémites, c'est déjà la loi. C'est juste qu'avant, elle n'était pas appliquée. Si Dieudonné était bien habillé, avec une belle mèche et qu'il était blanc, et s'il sortait les mêmes horreurs, ça ferait longtemps qu'il serait interdit, voire en prison. Mais comme il était humoriste, avant, et noir, donc forcément protégé de tout racisme, ben du coup il a le droit, parce qu'il a, je cite encore les candides et/ou ses anciens amis, "tellement de talent". Le Pen aussi, il avait du talent, ça ne l'empêchait pas d'être condamné à chaque dérapage. Hitler aussi, quel show-man c'était ! C'est quoi le talent, un totem d'immunité contre toute interdiction et de censure, même si tu outrepasses la loi ? Qu'est-ce qu'on s'en branle, qu'il ait eu du talent un jour ? Delon aussi il a eu du talent, mais j'irai pas voir ses films pour autant, parce qu'aujourd'hui il est gâteux. Ben Dieudonné c'est pareil, il est devenu con et antisémite, donc dehors.

Valls a fait son job

J'en peux plus de cette affaire. Si on ne parle que de ça, c'est de la faute de Valls, certes, mais aussi des médias, qui en font tellement trop avec lui, comme ils en ont fait trop avec Sarkozy y a dix ans. Quoique Valls fasse, lui le politique le plus populaire du moment, ça enclenche des boucles infernales sur les chaînes infos. Je ne supporte pas ce type et sa face de pet, son sourire de faux-cul et ses sourcils accusateurs. S'il allait au deuxième tour d'une élection présidentielle face à la droite, à part peut-être Copé ou le FN, je ne suis pas sûr de me déplacer pour aller voter pour lui. Cependant, même s'il en a fait trop, il a quand même fait son job de ministre de l'Intérieur, pour une fois. Ce boulot, ce n'est pas seulement de venir faire une visite avec le visage outré et compassionnel à Marseille dès qu'un type se fait buter, en promettant des renforts policiers à chaque fois. C'est aussi de faire des choses concrètes, d'agir quand un type utilise sa célébrité et son talent d'orateur pour faire revenir la peste noire dans ce pays, qui n'a jamais eu besoin de grand chose, dans son Histoire, pour retomber du mauvais côté. En 1940, ce n'était déjà pas la première fois que les juifs ou d'autres représentants de religions étaient persécutés dans l'ancienne "fille aînée de l'église". La France a créé les Droits de l'Homme il y a deux siècles, et a officiellement coupé les ponts avec le Pape il y a un siècle. Son passé anti juif, anti protestant ou anti musulman est beaucoup plus ancien, mais aussi plus lourd.

Dieudonné est hors la loi

Valls ne pouvait pas faire autrement. Le phénomène des quenelles dépassait les bornes, il devait réagir, c'est son job. Les quenelles qui sont INDISCUTABLEMENT des gestes antisémites, sinon ils ne seraient pas exécutés par les partisans de Dieudonné devant tous les lieux de l'Histoire juive, que ce soit le Mur des Lamentations ou l'école de Toulouse où des enfants ont été assassinés par Merah. Comme Dieudonné est INDISCUTABLEMENT antisémite, lui qui ne fait pas seulement chanter "Shoah ananas" par son public, il a aussi fait venir Robert Faurisson ou fait acclamer Youssouf Fofana sur scène. Comment peut-on encore discuter de telles évidence ? Nos actes font ce que nous sommes.

Ce n'est pas de la politique, ce n'est pas un débat sur la liberté d'expression, c'est un combat de salubrité publique. Y en a marre d'entendre dire qu'il y a des sujets plus importants. C'est vrai que les médias devraient parler d'autres choses, en plus de ça. Mais la lutte contre la peste fasciste doit mobiliser toutes les forces du pays. Quand un corps est frappé par un cancer, il se mobilise totalement pour le détruire. Le fascisme est un cancer qui se développe très vite, si on ne frappe pas très fort. Un traitement de cheval, c'est ce qu'il va falloir administrer au pays pour qu'il se débarrasse de ces salopards que sont Dieudonné, Soral, Zemmour et compagnie. Oui, Zemmour aussi, parce que le racisme et la xénophobie sont d'autres pans du débat français qu'il faut traiter, et vite fait. Ça fait trop longtemps qu'on laisse faire, ce n'est plus possible. Nos grand-parents ne se sont pas battus contre ça à leur époque pour que ça revienne maintenant.

Allez, sur ce, à plus tard, je vous laisse.

jeudi 3 octobre 2013

Lecture

Salut à tous. Et ouais c'est moi, près de quatre mois plus tard...

Ce matin j'ai eu un débat avec des amis sur la disparition progressive de l'écriture à l'école, au profit des supports informatiques et numériques. En ce moment, enfin depuis cet été, je suis plongé dans le bouquin de Sylvain Tesson, "Dans les forêts de Sibérie". Un récit de sa vie durant six mois, de février à juillet 2010, dans une cabane en pleine Sibérie, au bord du Lac Baïkal, la plus grande réserve d'eau douce au monde. Six cent kilomètres de long - Paris et Toulouse seraient submergés en même temps - , 80 de large, plus de 1500 mètres de profondeur... sous une épaisse couche de glace d'abord, avant d'arborer une transparence inégalable, l'été, avec une vue profonde de 40 mètres.

Tesson, aussi bon narrateur que son père, Philippe, est un vieux réactionnaire fâcheux, raconte les forêts, l'hiver, les paysages, l'immensité, le temps qui passe au ralenti, malgré l'aide de la vodka et des cigares, sa profonde méditation, d'une façon parfaite. A mon corps défendant, je m'y connais pas beaucoup en littérature, mais selon moi il a écrit un chef d’œuvre. Lorsqu'il part dans les forêts qui bordent le lac, avec ses deux chiens, quand il raconte ce qu'il voit, chaque plan de forêt, chaque arbre, la façon dont la lumière joue avec, je suis avec lui, je vois ce qu'il voit, je frissonne avec lui. Bref, je partage une expérience unique. L'imagination est le levier cérébral le plus puissant, plus que la vue, l'odorat ou même le
toucher, car il utilise tout ça réunit, les stimule. Quand on me raconte bien la beauté, je kiffe presque plus que de l'expérimenter vraiment.

Je ne me résoudrais jamais à l'abandon progressif mais inéluctable du papier de la part de notre société.. Un bout de mon appart est monopolisé par des cartons remplis de bouquins dont je ne me séparerais jamais, du moins tant que leur état l'autorisera. Un bouquin est vivant ; tout en lui est naturel, même si son industrialisation a forcément pollué sa fabrication. Un bouquin respire, il SENT, il a une odeur, un grain. Je suis ému par le toucher d'un bouquin comme je suis ému de toucher un arbre. Si vous consultiez mes cartons, vous vous diriez que je respecte pas les livres, que je les entretiens mal. Ils sont vieux, abimés et écornés. C'est pourtant le contraire : je ne supporte pas quand quelqu'un corne une page pour se souvenir de l'endroit où il était. S'ils sont cornés, c'est par ce que je me suis baladés avec, à l'intérieur de mes sacoches successives, ou dans des cartons. Donnez moi une bibliothèque, digne de ce nom, et je vous montrerais. Je rêve d'avoir un jour assez de place pour m'en faire une. Une bibliothèque, une vidéothèque, que demande le peuple ?

Je n'aime pas qu'ils soient cornés, mais j'aime qu'ils montrent qu'ils ont vécu, que je les ai lus. Il y a dans mes cartons des bouquins que je n'ai pas lu, ou juste une fois, au collège, au lycée ou à la fac par exemple, pour les cours de Français ou de Littérature, ou des livres que j'ai récupéré dans la bibliothèque de ma mère, aussi férue au moi, sinon plus, de lecture, et qui m'a inoculé le virus. Et bien ces livres là sont plats, en bon état, ils n'ont pas vécu. Ils sont fades, ternes. Comme ces enfants trop protégés par leurs parents et qui n'ont pas de personnalité parce qu'ils n'ont jamais été confrontés au monde extérieur. Jamais malades, jamais tristes, superficiellement heureux... mais pas vivants pour autant. C'est pour ça que je n'aime pas emprunter des bouquins en bibliothèque : j'aime que le livre m'appartienne, j'aime l'idée qu'il vieillira avec moi, l'émotion future de le retrouver caché dans un carton ou sur une étagère. J'aime pas la culture jetable, ou prêtable, éphémère. Consommable. Quoi, je lis un livre et voilà, il disparait de ma vie, sans laisser de trace, à part dans ma tête et ses trous de mémoire ? Inconcevable. Pour moi, un livre doit rester dans ma vie, longtemps après sa première lecture. C'est peut-être pour ça que je ne raffole pas forcément des musées, au fond. En fait, j'aimerais même qu'ils me survivent, qu'ils profitent à quelqu'un d'autre.

Les bouquins, quand ça vieillit, ça ne fait pas que se corner - les rides, on peut rien contre - ça s'arrondit, ça se tord. Ils sont rectangulaires, mais leurs coins disparaissent, ils sont moins acérés avec le temps et l'usure. A l'achat, ils sont comme les femmes, ils brillent et agichent mais ils sont coupants, piquants, ils ne sont manifestement pas près à être lus facilement. Pour lire un livre, s'installer dedans, il faut savoir l'amadouer. Quand on l'ouvre la première fois, il semble résister, comme s'il voulait nous montrer qu'il n'allait pas se laisser lire aussi facilement, qu'il faut le mériter, le conquérir. Il arrive qu'un livre gagne la bataille, qu'il me repousse. C'est une défaite, pour moi mais aussi pour lui, aussi.

Au début, on ne peut pas le poser à l'opposé de la tranche, sur les pages, pour ne pas perdre celle qu'on lisait, parce qu'il se referme tout seul. A la fin, on a limite du mal à le refermer. C'est tout un processus, une relation humaine avec un auteur, mais surtout avec un objet. Avec un début et une fin. Quand j'achète un livre, il y a comme une excitation, comme les veilles de grand départ. J'ai une fâcheuse manie de ne pas finir les livres que je lis, simplement parce que si j'en achète un autre, il faut que je le lise tout de suite. Impossible de le mettre en attente, parce que l'achat d'un livre est toujours impulsif chez moi. C'est comme si vous me disiez de ne pas consommer de suite la pâtisserie que je viens d'acheter pour atténuer la perpétuelle sensation de faim qui a modelé mon corps depuis l’adolescence. Si j'achète un livre, je dois tout de suite m'y plonger. Sinon, j'ai trop peur que l'envie passe, que le moment disparaisse.

Y a la sensation du toucher, y a l'odeur du bouquin neuf, puis celle de la poussière, le jaunissement léger des pages. Rien ne remplacera ça, jamais. Je ne suis absolument pas attaché aux objets, ces leurres d'éternité, ces fausses balises de nos vies, sauf quand ils sont signes de richesse d'esprits. Si je suis réac sur un truc, c'est bien ça : la lecture, l'objet de lecture. On ne remplacera jamais le ciné, on a malheureusement remplacé les vinyles mais on ne pourra pas remplacer les livres. Je n'empêcherais jamais quelqu'un de lire un bouquin sur tablette. En quoi on m’empêcherait de savourer un livre, sur l'autel totalitaire de la modernité ? Je hais les phrases du genre "c'était mieux avant" parce que c'est galvaudé, tant c'est devenu automatique, et même politique et sociologique. Je ne suis pas réfractaire à la technologie, au numérique, ce serait plutôt l'inverse en fait. Le progrès, c'est la vie. Mais qu'on ne vienne pas m'emmerder avec mes livres. Parce que le support de savoir le plus réfléchis, le plus poétique, le plus civilisé, ça restera toujours le papier selon moi. Un singe saura communiquer par un clavier, mais ne saura jamais lire ou écrire. Ce sont les mamelles de la connaissance et de la civilisation, c'est ce qui a fait de Rome et de la Grèce, des Incas et des Chinois, les maîtres de leurs temps : l'invention de l'écriture et de la lecture, leurs règles. Ne pas savoir bien communiquer, sans règles orthographiques strictes, c'est le début de l'anarchie. Et la lecture nourrit l'écriture.

Je vous laisse, en espérant avoir évité un maximum de fautes... et merci pour votre lecture patiente et bienveillante.

vendredi 28 septembre 2012

Piqure de rappel

Salut à tous,

Bon, je ne vais pas encore m'excuser de moins écrire qu'avant... c'est comme ça, j'ai tenu plus de trois ans à un très bon rythme, mais on ne peux pas toujours être au top. Est-ce que vous me lisiez toujours, vous ? Ben non. Et ben moi, j'écris pas toujours non plus.

En ce moment, j'ai un peu la tête ailleurs, mais je ne sais pas trop où. Je suis moins connecté au monde, aux chaines infos, etc. A partir du moment où j'ai récupéré toutes ces chaînes, j'ai passé mon temps à suivre les infos, les débats, rien ne m'échappait, ou presque, quitte à regarder plusieurs fois d'affilée le même flash info. Je ne voulais rien rater, et je ne ratais quasiment rien.

Il faut dire que les enjeux étaient importants - en politique en tous cas. Je crois que cette mobilisation intense de ma part pour suivre tous les évènements de l'actu française tenaient en un but, un objectif : l'élection présidentielle, et le lourdage du nabot, avec trace de pied aux fesses incluse. Pendant un an, j'étais pendu à la session du soir d'iTélé, je regardais le débat quotidien entre Joseph Macé-Scaron, l'ancien du Figaro tatoué jusqu'aux coudes et dont la mauvaise foi de gauche arrivait même à m'énerver, et Yves Thréard, l'actuel du Figaro, un de ces journalistes de droite (oui il en existe, contrairement à ce que Eric Brunet continue de penser) qui est le moins pénible à écouter pour moi. Oui il a des opinions différentes des miennes, mais il est structuré, il s'exprime bien, argumente bien et n'est pas agressif. Pas comme moi quoi. Ni comme Brunet, dont la mauvaise foi est jouissive.

Bref je suivais tout ça, parce que je ne voulais rien rater de la campagne. Je regardais les débats, je regardais les meetings de Hollande et de Mélenchon, parce que j'avais une telle haine envers Sarkozy, j'avais une telle envie qu'il dégage que j'ai du croire qu'en restant scotché aux infos, j'allais participer à cette tâche nationale, cette nécessité mortelle et sanitaire, qu'était de virer ce démagogue autoritaire, populiste et réactionnaire, qu'était ce sale type. Si je m'en étais foutu, il aurait peut-être gagné, qui sait ? Qu'est-ce que c'est que le cerveau humain, quand même...

Mais depuis l'élection de Hollande, ou du moins à partir des vacances - parce que j'ai quand même goûté à fond ses premières semaines de mandat, rien que pour me faire à l'idée que voilà, a y est, Sarkozy a été viré, et la gauche est au pouvoir, enfin la France ne serait plus un paria dans le monde à cause de son Berlusconi à elle -, j'ai l'impression d'avoir inconsciemment lâché prise. D'abord, les chaînes infos pendant les vacances, c'est pas terrible. L'info est mince, tout comme l'expérience des jeunes journalistes timides et bien coiffés qui remplacent les habituels "titulaires" du poste. Ca baffouille, ça brille trop... bref, on s'ennuie ferme. Vous avez remarqué comme les grands évènements du monde, comme les blockbusters au cinéma, semblent attendre la rentrée ou se mettent en veille pendant les vacances, histoire que le monde entier les voit bien en face ? La chute du mur de Berlin en novembre, le 11 septembre en... septembre, DSK en mai... bon ok, Armstrong sur la Lune c'était en juillet... mais bon, on ne vivait pas encore à l'époque du tout info et de la communication, sinon je suis sûr qu'ils auraient fait plus vite ou attendu deux mois de plus...

Et depuis, je suis tout ça de loin. Je regarde la France retourner sa veste à propos de Hollande aussi vite qu'elle le fait suivant les résultats de l’Équipe de France de foot. A-t-elle vraiment cru qu'il allait parvenir à tout changer en quelques semaines, vacances incluses ? Certes son action, et celle de Jean-Marc Ayrault, semblent terriblement manquer d'énergie et de poigne. Mais c'est un peu comme si la France passait de l’ectasie à la verveine, comme un junkie qui se mettrait à l'aspirine, un poivrot qui laisserait la vodka pour commencer une carrière d'accro à l'Orangina. Pendant cinq ans, Sarkozy et sa bande de cocaïnomanes sous acides ont habitué le pays à une action trépidante, saccadée, désordonnée, et qui ne cessait de vouloir se contenter que d'accompagner l'actu à coups répété de lois populistes et démagogiques, oubliées aussi vites qu'elles étaient annoncées. Occuper l'espace médiatique, tel était sa devise et son seul et unique programme. Mais sa façon de gouverner faussement énergique a finie par être  trop voyante, et les gens, qui ne sont des moutons que pendant un temps, même trop long, ont fini par le sanctionner. Mais l'addiction était trop forte. Les gens ont été trop habitués à la suractivité, même factice, même superficielle, de Sarkozy.

Pourtant, on pouvait imaginer que Hollande avait justement été élu pour ça, pour que ça s'arrête, que ça se calme. Que les gens n'en pouvaient plus d'être constamment agressés, d'une façon pour les autres, par les lois segmentantes de Sarkozy, qui ne faisaient que diviser, que partager, que pousser les uns contre les autres. Et du coup, Hollande et sa rondeur, son apparente douceur, c'était l'antidote parfait à la Sarkozie, cette maladie qui épuisait la France depuis dix ans. Il allait y avoir du travail, mais ça allait être fait de façon plus juste, et surtout de façon normale, sur la durée, pas la précipitation. Un travail en profondeur, qui n'allait pas forcément se voir, ou beaucoup plus tard. C'est du moins ce qu'on lui demandait.

Et que lui reproche-t-on aujourd'hui ? Exactement de ne pas faire ce qu'il avait annoncé, c'est-à-dire de ne pas occuper incessamment l'espace médiatique à coup de formules chocs et d'avis définitifs. Je me doutais que ça allait arriver, mais pas à ce point. Et puis les médias, sevrés de petites phrases, de sentences xénophobes et de clash en tous jours, lui font payer ce calme trop paisible, qui nuit forcément à leurs chiffres d'audience. Franchement, c'était quoi ce festival de couvertures contre Hollande, du genre "bah alors qu'est-ce tu fous ?", "fini de rire", "est-il si nul ?"... totalement délirant. Comment ça, il gouverne mais ça ne se voit pas, et nous alors ?

Et puis y a Manuel Valls, qui a bien appris par cœur son "petit Sarkozy appliqué", qui tente d'imiter - et plutôt bien pour l'instant - le coup d'état médiatique réalisé par Sarkozy y a dix ans, au détriment d'un Chirac vieillissant. Là, c'est Hollande qui joue le rôle de Chirac, et Valls qui se balade. Mais, si son action contre les Roms est aussi honteuse que celle de ses prédécesseurs à Beauvau, ce n'est pas le cas dans les paroles. Quand Hortefeux ou Guéant accumulaient les horreurs sur les Roms, les Arabes et/ou les Musulmans, Valls ne dit rien de tel. C'est peut-être une petite différence, mais s'en est une réelle, du moins à mes yeux. On n'a pas l'impression que Valls prend du plaisir en ce qu'il fait, contrairement aux autres. Pourtant, je n'ai jamais été un fan de ce type, et ce n'est pas grâce à lui si je me mets un jour à voter Socialiste un jour. Parce qu'une chose est sûr, il sera candidat très vite, peut-être pas en 2012 mais après, c'est sûr et certain. Il ne raye pas le parquet, il l'arrache.

Voilà, pour la politique... et puis y a le PSG, bien sûr. C'est là que mon audience chute brutalement, mais c'est pas grave. Le PSG qui est encore loin d'avoir gagné d'avance le championnat, croyez-moi. Les dernières fois qu'il devait le gagner largement, en 1995-96 ou l'année dernière par exemple, il a échoué. A chaque fois, il est tombé sur des équipes improbables (Auxerre et Montpellier), qui gagnaient leurs matches de façon improbable, et qui n'ont rien fait ensuite, cette fois d'une façon tout à fait logique. Bref, c'était juste pour faire chier quoi.

Surtout, ce qui me gâche les bons résultats actuels, c'est qu'avec le statut acquis par le PSG, avec cette supposée supériorité obtenue grâce à des investissements hors du commun, j'ai l'impression de ne plus goûter complètement certaines victoires, parce que c'est soit-disant normal. Le PSG gagne 4-0 à Bastia ? Normal. 2-1 à Lille ? Normal. 4-1 contre Kiev en Ligue des Champions ? Normal. Il y a deux ou trois ans, de tels résultats auraient été tout simplement inespérés. Gagner à Bastia, oui, mais 4-0, et en ne forçant même pas en plus ? Et mettre 4 buts à Kiev ? Et battre Lille, l'autre favori du championnat et chez qui le club parisien ne gagne jamais, et sur sa pelouse ? Bah non c'est pas des exploits, puisqu'ils sont trop forts. Et du coup, c'est trop facile. Et si on gagne le championnat, pareil, ce sera trop facile. A force de dire que le PSG est trop fort, ils sont en train de ma gâcher le plaisir d'avoir enfin une équipe séduisante, après 15 ans d'attente. Quinze ans ! On n'a pas le droit d'être bon nous aussi ? Et si on l'est, c'est parce que c'est facile et normal ? Comme dirait ce connard de Nanard, "je vous emmerde".

De toutes façons, ce n'est jamais facile avec le PSG, il ne faut pas l'oublier. Parce que malgré nos bons résultats actuels, Marseille a six points de plus. L'année dernière aussi on était derrière Montpellier, tout le monde disait qu'on allait leur passer devant à un moment ou à un autre, et c'est vrai qu'on a tout gagné jusqu'à la fin, mais eux aussi, et au final les deux équipes ont terminé avec des scores de champion... pourquoi pas cette année ? Y a toujours un truc qui va pas avec ce club, foi de supporter. Je ne vois pas ce qui pourrais changer. De toutes façons, on en saura plus quand on aura joué Lyon et Marseille. Là, on sera un peu plus fixé. En espérant que la malédiction se lève - enfin.

Bon ben pour quelqu'un qui ne s'intéresse plus à l'actu... je crois que la perfusion est toujours là.

Je vous laisse !

mercredi 18 avril 2012

J - 4 jours, 8 heures, 57 minutes, 27 secondes

Salut à tous,

Tic tac tic tac tic tac... elle a été tellement longue cette campagne qu'on pouvait se demander à un moment si on allait y arriver. Et ben oui, finalement on y est. Hollande est enroué, Sarkozy brasse du vent, Mélenchon minaude, Le Pen éructe... on sent que chez les candidats aussi, la cloche est attendue avec impatience. Une bonne nuit de sommeil et un repas normal en famille, voilà ce dont ils rêvent à mon avis.

Je me rappelle de mes élections précédentes... ma première présidentielle fut celle de 1995. Autant dire que pour l'instant, je n'en ai gagné aucune ! C'est même flippant maintenant que je l'écris... je n'ai jamais gagné une présidentielle ! Des législatives, oui, des régionales, voire municipales (pas depuis dix ans...) parfois, mais des présidentielles, jamais.

La première, donc, j'avais 20 ans et j'étais au lycée. J'étais en STT option secrétariat (on ne rigole pas dans le fond), que j'avais préféré à l'option commerciale parce qu'il y avait une fille que j'aimais qui avait choisi cette voie, et qu'au fond je m'en foutait royalement, vu que je voulais être en L, à la base. Alors secrétariat ou commerce... ça m'en touchait une sans bouger l'autre, comme qui dirait. Bref, du coup je me suis retrouvé dans une classe de 23, dont 20 filles. la meilleure année scolaire de ma vie, et ce sans parvenir à sortir avec une seule d'entre elles. Mais mes deux congénères masculins et moi, on avait été traités comme des rois par ces demoiselles pendant neuf mois. Quand même, le moment où un des deux mecs était sorti avec la fameuse fille, j'avais moins aimé, surtout qu'il était d'une laideur difficilement descriptible. Encore aujourd'hui je ne comprends pas, mais passons.

C'est la première fois que je parlais politique avec d'autres personnes que mes parents, avec qui c'était enrichissant mais rarement contradictoire, puisqu'ils partageaient, peu ou prou, mes opinions et mes valeurs, qu'ils avaient su me léguer, ce qui n'est pas si automatique que ça. C'était donc la première fois que je trouvais de la résistance lorsque je parlais politique, et ça m'a donc fait un choc de rencontrer mes premières personnes de droite. A 20 ans, vous imaginez ? Provenir d'une famille fondamentalement communiste et ouvrière, et me rendre compte qu'il y a des gens qui ne pensent pas que l'argent pourri le monde, et qu'il faut protéger les plus faibles socialement avant de vouloir enrichir les déjà riches, ça surprend, croyez moi. Si j'avais été confronté plutôt à ces opinions tellement opposées aux miennes, peut-être serais-je plus tolérant et moins nerveux quand je discute politique, qui sait. Je ne pouvais pas avoir un oncle UMP (enfin RPR, à l'époque...), bordel ?

Remarquez, je me demande si je n'en avais pas un... mais finalement ça parlait peu politique à la maison, notamment quand on recevait des gens. Du coup, j'ai rien vu venir. Et les opinions de gauche, pour moi, coulaient de source. A un tel point que quand j'étais gosse, je croyais que ce qu'on appelait la "gauche", c'étaient les communistes, et la "droite", les socialistes, parce qu'on ne parlait que de ça à la maison, à l'époque où le PC existait encore sans l'aide d'un sénateur socialiste débauché. Tout le reste n'existait pas pour moi, et quand c'est apparu c'est devenu comme l'ennemi ultime.

Donc, dans ma classe, beaucoup de filles, de futures secrétaires - je veux dire, des "assistantes de direction", désolé. Et elles aimaient bien Chirac, ces filles. Pour son programme économique ? Sa politique sociale ? Non non, parce qu'il "faisait plus président" que Jospin. C'est ce jour là que j'ai commencé à penser que le suffrage universel était une aberration, si l'élection ressemblait à ce point à un concours de beauté, et surtout si l'éducation civique n'était pas plus répandue dans ce pays qui aime pourtant tant la politique. Mais il faut dire qu'élire un Roi tous les 5 ou 7 ans, c'est quand même excitant non ? Parce que c'est ça, finalement. Le président réside dans un palais, ses apparitions médiatiques sont des évènements sans commune mesure avec quoique ce soit, et ses interviews sont plus des concours de cirage de pompe que de véritables interrogatoires. Les journalistes étrangers n'ont pas fini d'être effarés par la façon avec laquelle nos journalistes sont choisis par le Château, et affables avec son locataire quand ils l'ont en face de lui... une question un peu "osée", et l'impudent a aussitôt droit aux gros yeux présidentiels... et il peut être sûr qu'il ne reviendra plus. Et ça, ça ne date pas de Sarkozy, c'était comme ça sous le premier président de la Ve République, De Gaulle. Si ça nous choque avec Gnafron, c'est finalement parce qu'il ne fait pas président, que sa tronche, ses façons et sa langue font que sa présence dans ce fauteuil aussi prestigieux dénote singulièrement. Ses prédécesseurs faisaient quand même beaucoup moins représentant de commerce, plus monarque genre Louis-Philippe, même ce grand couillon de Chirac.

Bref donc 1995, d'entrée, a entamé mes illusions d'une élection uniquement portée par les idées, les projets et la compétence, plutôt que l'apparence ou le sex-appeal... voire le sexe tout court, puisqu'en 2007, je me rendrais compte que beaucoup était prêt(e)s à voter pour Ségolène Royal parce que c'était une femme, ce qui n'avait pas un grand rapport avec un programme politique. Quoique... bref, comme pour Obama, avoir une femme présidente aurait été une formidable avancée sociétale pour ce pays terriblement paternaliste. Mais l'idée de voter pour quelqu'un PARCE QUE c'était une femme, ça me semblait juste ahurissant, même si je comprenais la mécanique. Mais dès qu'on me parle de crédibilité extérieure, d'apparence ou d'autres joyeusetés de ce genre pour voter pour quelqu'un, ça me rend dingue, même quand l'intention est bonne, comme pour Royal. Si le FN promulguait un candidat noir - il serait capable de ce genre de canular - je ne voterais pas pour lui pour autant. Si j'ai voté Royal au second tour, c'est parce qu'elle était de gauche et affrontait Sarkozy, point barre.

Bref, entre temps, moi qui croyait que 95 avait été une mauvaise expérience - je me souviens avoir été abattu lorsque le résultat s'était affiché sur ma petite télé, en me disant "putain, 7 ans !" alors qu'en fait on n'en est toujours pas sorti, 17 ans plus tard... - voilà que ma seconde présidentielle, celle de 2002, s'approchait. Je n'étais plus au lycée mais à la fac, j'avais d'autres amis avec qui on avait fait une soirée électorale pour le premier tour... depuis, quand j'ai une invitation de ce type j'accepte, mais toujours avec une grosse appréhension. Si le candidat souhaité par les invités de la soirée - en général, c'est le même... - gagne, c'est super, mais quand il est battu, bah ça fout un peu l'ambiance en l'air... alors quand il est devancé au premier tour par les fachos, c'est un carnage, plus personne ne parle. C'est un peu comme si tu allais à un concert au pif, soit Pink Floyd, soit Franck Michael, si t'as pas de chance ta soirée risque d'être longue, très longue... sauf si t'es gérontophile. Remarque, ça marche pour les deux, ça.

Bref, 2002 m'a démonté. Comme pour le 11 septembre, je pense que tout le monde se souvient de ce qu'il faisait le 21 avril 2002, dans la soirée, lorsqu'il a appris qu'il allait devoir aller voter entre Chirac et Le Pen, la varicelle et la variole, Mussolini et Hitler, Napoléon III ou Napoléon, de la jardinière de légume ou une salade d'endives, Dunkerque ou Charleroi, etc. Imaginez - ou rappelez-vous - le déchirement que ce fut d'aller voter ce jour là. Entre les deux tours, le peuple républicain avait défilé dans Paris pour refuser l'idée que les fachos soient véritablement en lice pour atteindre le pouvoir. Dans les cortèges bondés - j'y étais, je me souviens d'un sentiment d'enthousiasme mais aussi d'étouffement -, des adolescentes brandissaient des pancartes "No pasaran !!" et des portraits du Che. Le gouvernement avait également annoncé que ceux, qui s'annonçaient nombreux, qui comptaient aller voter complètement vêtus de noir en signe de deuil seraient refoulés des bureaux de vote ! La France, bien assise sur ses fameux Droits de l'Homme, et qui aimait tant donner des leçons de morale démocratique au reste du monde, vivait un des moments les plus noirs de son Histoire, et n'en était pas fière. Encore aujourd'hui, quand on voit la droite "modérée" utiliser allègrement les arguments du FN pour des fins électorales, on se rend compte à quel point cette élection a fait du mal au pays, et c'est loin d'être terminé.

Et puis vint 2007, donc, j'en ai déjà parlé. Fin de la période Chirac, l'élection se déroule autant sur le net qu'à la télé, est plus citoyenne qu'avant, donc, et deux jeunes loups s'affrontent pour succéder à ce vieillard déjà à moitié sénile, et sourd en plus, qui ne faisait rien depuis 2002, où il avait perdu une occasion unique de réunir le peuple contre la peste noire, après qu'il ait été élu avec 82 % des voix... forcément, après ces années molles, consternantes, chloroformées, les gens ont été plus séduits par l'énergie maladive de Sarkozy, qui les séduisait en plus en leur promettant la sécurité, que par la faconde quasi christique de Royal, réincarnation de Jeanne d'Arc, jusque dans le fait qu'elle fut sans doute trahie par le parti, et notamment Hollande, comme la pucelle par Charles VII. Déjà distancée, elle ne parvint pas à retourner Sarkozy lors du débat, parvenant même à faire passer ce dernier pour un calme, ce qui n'était pas gagné. C'est ce qui me fait un peu peur pour 2012 : Hollande est loin d'avoir gagné contre Sarkozy, il a intérêt à avoir une sacrée avance en voix avant le débat. D'après les derniers sondages ça semble bien parti, mais on ne sait jamais.

Bizarrement, même sur Facebook, je rencontre peu de gens de droite, alors qu'ils représentent tout de même encore aujourd'hui quasiment la moitié de la population. Il y en a, quand même. Ce qui est "marrant", c'est que ceux de gauche que je côtoie me semblent encore plus pessimistes que moi, ils ont peur d'un retournement de situation, disent ne pas se fier aux sondages, ce qui n'est pas complètement stupide a priori, vu l'antécédent de 2002. Mais s'ils se trompent souvent, ils ne se trompent pas avec une telle marge. Quand Jospin devançait Le Pen dans les sondages en 2002, il ne le devançait que de 5 à 8 points maximum, et les gens avouaient moins volontiers qu'ils vont voter Le Pen qu'aujourd'hui. Aujourd’hui, c'est quasiment le double, et ce dans toutes les enquêtes. A la rigueur, si on se fie au sondage d'hier qui met Sarkozy à 5 points de Hollande et à 7 de Le Pen, on peut un peu plus imaginer un 21 avril à l'envers. Et là, si on pourra toujours déplorer la présence des fachos à un second tour, pour la deuxième fois en trois élections, ce qui sera tout sauf un hasard, ce sera quand même tout bénèf pour la gauche. Et puis ce, serait moins choquant : ça restera un duel droite-gauche, ce qui n'était pas le cas en 2002... ce sera moins un déchirement pour les électeurs UMP de voter Le Pen, si ? En tous cas pas pour la moitié d'entre eux, à mon avis...

Bref, je vous laisse, et allez voter hein ! Sinon je viens vous chercher, moi !

lundi 12 décembre 2011

Three

Top 3 des...

... personnalités qui sont de gauche et qui l'assument :
- Yannick Noah
- Stéphane Guillon
- Guy Bedos

... personnalités qui sont de droite et qui l'assument :
- Michel Sardou
- Laurent Gerra
- Christian Clavier

- personnalités de gauche qui s'assument mais qui veulent faire neutre (ou de droite) :
- Laurent Ruquier
- Carla Bruni
- David Abiker

- personnalités de droite qui s'assument mais qui veulent faire neutre (ou de gauche) :
- Mathilde Seigner
- Mimi Mathy
- Muriel Robin

... personnalités qu'on pensait de droite et qui sont de gauche :
- Patrick Bruel
- Thierry Ardisson
- Daniel Auteuil

... personnalités qu'on pensait de gauche et qui sont de droite (promotion Eric Besson) :
- Dieudonné
- Robert Ménard
- Gaspard Proust

... personnalités qui font "de gauche" et qui sont de droite :
- Jean-Marie Bigard
- Fabrice Lucchini
- Florent Pagny

... personnalités qui font "de droite" et qui sont de gauche :
- Genviève de Fontenay
- Guillaume Durand
- Pierre Bergé

... personnalités de droite qui iraient bien à gauche (promotion Roselyne Bachelot) :
- Patrick Sébastien
- PPDA
- Franz-Olivier Giesbert

... personnalités de gauche qui iraient bien à droite (promotion Manuel Valls) :
- Frédéric Beigbeder
- Nicolas Bedos
- Bernard Tapie

... personnalités qui sont centristes et qui l'assument :
- François Berléand
- Pas mieux.
- Je passe.

... personnalités qui sont probablement de gauche mais en fait ça reste à prouver :
- Naguy
- Jean-Jacques Goldman
- Alain Souchon

... personnalités qui sont probablement de droite mais en fait ça reste à prouver :
- Zinedine Zidane
- Michel Drucker
- Gaspard Proust

... personnalités qui pourraient être de droite que je m'en fouterais grave :
- Scarlett Johansson
- Léa Seydoux
- Javier Pastore

jeudi 8 décembre 2011

Radio Gaga

Salut à tous,

Imaginez une soirée entre amis. Vous êtes là, une demi douzaine d'inséparables, de très diverses origines mais qui ne manquez jamais de faire chauffer vos zygomatiques dès qu'une bonne table parvient à vous réunir. Ou même, pas besoin de table, juste quelques chaises, un fauteuil un peu défoncé... on a tous un groupe d'amis comme ça, non ? En tous cas, vous n'en avez certainement pas un aussi bien que le mien. Bref, je digresse.

Donc voilà, vous éventrez un paquet de gâteaux apéros, vous étêtez quelques bouteilles de coca light ou de jus d'orange (oui nous on est comme ça, on reste sobres tout en déconnant quand même, même si certains d'entre nous n'ont pas encore complètement renoncé à l'alcool :p) et puis voilà, ça parle de tout et de rien, suivant un conducteur complètement foireux, sautant des problèmes de boulot à ceux de couples, la garde des enfants ou l'actu. Et puis tout d'un coup, l'un des convives, soudainement touché par un doigt divin, élève la voix, et sort une vanne absolument hilarante. Suivant le thème de la discussion, ça peut être un truc tout simple, genre "tout comme Jean-Claude !", ou une longue tirade qui commence comme une phrase ordinaire et qui soudain part en vrille, ce qui crée un effet comique à double tranchant : ou vos compères sont réceptifs, voire habitués à ce genre de trucs de
votre part, et ça marche très bien, soit personne ne comprends et vous passez pour un con pour le reste de la soirée. Le métier de vanneur en chef, c'est risqué, vous êtes toujours sur un fil. Mais tant que vous enchaînez les pas réussis, c'est vraiment enivrant.

BREF, donc voilà, Jean-Michel, qui d'ordinaire est si terne, si peu inspiré, sort une inhabituelle vanne hilarante, qui se fait se tressauter toute l'assemblée. Et maintenant, imaginez que, assises derrière vous, une trentaine de personnes se marre également, applaudissant la saillie et se regardant entre eux tellement ils sont content d'être là. Sauf que la soirée continue comme si de rien n'était, pendant deux bonnes heures.

Et en plus, vous êtes payés pour ça. Imaginez, hein.

Et bien, c'est ça être chroniqueur chez Ruquier. Une soirée entre amis, mais en public. D'ailleurs, ils continuent de balancer des conneries durant les coupures... mais leurs discussions ne diffèrent pas vraiment des nôtres... "ohlàlà j'adore la dernière pub Renault, celle qui se moque de la pub Volkswagen..." "Purée j'en peux plus de leur histoire de triple A..." Waw, les stars comment c'est trop différent de nous :p

Je suis allé les voir mardi matin, à Europe 1, enregistrer "On n'est pas couché"... euh non, "On n'demande qu'à en rire"... "On a tout essayé"... ah non merde, attendez... "On attends le bus" ? "On est pas bien là ?" Attendez, ça va me revenir... "On arrive quand ?" Non ça c'était moi quand j'étais gosse... ah oui, "On va s'géner !" Piouf, excusez ce moment d'égarement, mais faut avouer qu'au niveau titres d'émission, il se pose là quand même, difficile de faire plus original. Faut juste garder le "On" du début, pour bien insister sur le concept de "Bande à Ruquier" j'imagine, et ensuite tu mets n'importe quoi derrière, et ça marche, bing 25 % d'audience minimum. C'est pas compliqué la télé, coco.

En l’occurrence là, c'est plutôt de la radio, ce qui explique les tronches de déterrés des chroniqueurs payés pour nous faire nous gondoler ce matin. L'adorable Michèle Bernier et l'imbuvable Caroline Diament (qui arrive sous des applaudissements trop peu nourris à son goût, et qui nous engueule pour ça, genre c'est Lady Gaga, non mais je rêve...) débarquent avec des tronches à inspirer Picasso, équipées de valises sous les yeux prêtes pour un trip de trois mois au Pérou. Même chose pour Bigard, nettement plus sympa avec le public que l'autre branquignole, alors que de son côté, il pourrait carrément jouer la star. On a également le droit à Steevy, qui heureusement ne parlera pas trop, sauf lorsqu'il comparera l'invité mystère (Alain Souchon) à... merde, comment elle s'appelle l'autre folle de la mode là, avec le palmier sur la tête... ah oui, Sonia Rykiel (merci Google), et Olivier de Kersauzon, plus souvent penché sur son téléphone qu'autre chose. Il a fière allure, le grand aventurier de la mer, à tripoter son Nokia toutes les trois minutes comme un vulgaire collégien. Ah oui, et il tripotait Caroline Diament aussi. Ils sont vraiment affamés, ces marins.

Avant cela, Ruquier nous aura sorti son speech habituel : on ne souffle pas, on ne discute pas, soyez dynamiques, mais ensemble. Oui donc si je sens comme une vague de dynamisme me saisir les tripes, je vérifie d'abord autour de moi si mes voisins ressentent la même chose avant de la laisser s'échapper, c'est ça ? Les doigts dans le nez, le métier de public. L'avantage, c'est qu'à la radio, même si c'est filmé, ils ne mettent pas les jolies filles au premier rang, comme à la télé. Du moins, pas encore. En même temps, j'ai bien compté, je crois qu'il y avait deux jolies filles dans le public, dont une à côté de moi d'ailleurs, pas évident de constituer un premier rang avec ça. Par contre, toute une rangée de mamies, c'était largement faisable.

Je sais pas si vous vous souvenez, j'y étais allé en avril 2009, et je l'avais raconté ici. C'était dans le même studio Merlin, et pour y aller vous montez un escalier, et passez devant d'autres studios plus petits. Enfin bref, je l'ai déjà raconté ça. Sauf que maintenant ça commence plus tôt, 15h30 au lieu de 16, et qu'il n'y avait pas d'invité mystère... j'avais peur de tomber sur un invité dont je me foutais royalement, et en fait je pouvais difficilement rêver de mieux, avec Alain Souchon, mon idole dans la chanson française.  J'ai pas réussi à me prendre en photo avec lui, dommage. Par contre, j'avais deviné son identité 10 minutes avant tout le monde, tranquille quoi...

Ce qui est fou, c'est que l'enregistrement dure vraiment 2h30, de 9h30 à midi, comme la durée de l'émission, sauf qu'au montage ils enlèvent presque une heure, juste pour caser les infos, trois chansons et les pubs, surtout...

Manque de bol, les quelques photos que j'ai pu prendre sont prisonnières dans mon téléphone dont la dos est coincé depuis des mois... en même temps, des photos floues d'Alain Souchon ou de Michèle Bernier, c'est pas indispensable si ? :p

Je vous laisse.

jeudi 17 novembre 2011

Kiff


Salut à tous,

Attention, mon humilité et ma modestie légendaires vont en prendre un coup, mais je crois que je vais me jeter des fleurs... ça va, je m'en mets suffisamment sur la tronche dans ce blog pour pouvoir me permettre de temps en temps une petite séance de cirage non ?? "Sans la liberté de blâmer, il n'est point d'éloge flatteur", c'est la devise du Figaro, pour une fois que mon employeur occasionnel ne dit pas une connerie...

Y a des matins comme ça, je kiffe. Mes amis et ceux qui me connaissent bien vous diront que je m'emballe aussi facilement que je m'énerve, c'est-à-dire très très facilement, mais voilà, je kiffe. J'adore voir publié un de mes articles, surtout un bon. J'adore qu'ils soient bien placés en une, mais surtout que le contenu me satisfasse parce que je l'aurais soigné, bichonné, et surtout quand ce n'est pas une commande.

Je ne parle pas là de ces compte-rendus de match livrés en fin de live, tout moites de la sueur délivrée tandis
que le match se déroulait encore, que des entraîneurs presqu'aussi fiévreux que moi tentaient des changements pour soit garder un résultat, soit le forcer, que des cartons tombaient et que des buts tardifs me ruinaient ce même compte-rendu au dernier moment. Ceux là sont bâclés, ils sont petits, sans forme ni personnalité et participent en général à ce fameux phénomène d'immédiateté de l'info éphémère déjà évoqué ici, et qui me hérisse tant le poil.

Non là c'est moi qui ai proposé le sujet. En même temps, c'est toujours le même : un papier stats, bilan, sur une équipe ou une compétition qui vient de terminer sa saison. J'en signe plusieurs par an, deux sur la Ligue 1 - à la trêve et en fin de saison -, un pour chaque grande compétition internationale (donc tous les deux ans) et un par an sur les Bleus. C'est de ce dernier dont il s'est agit ce matin.

J'envoie d'abord un petit mail en début de semaine, pour être sûr que ça les intéresse, non pas que je doute de leur réponse, qui est toujours positive, mais sans doute plus pour le plaisir d'avoir une réponse positive, de recevoir un mail disant qu'on veut bien de moi et de mes bons offices. Rien qui ne soit vraiment étranger à la nature humaine, en fait. Et puis, imaginons que par le plus grand des hasards, ça ne les intéresse finalement pas, ça me ferait chier d'avoir pondu un de mes bons papiers pour qu'il ne brille que dans les tréfonds brumeux et mal rangés de mon ordinateur...

Donc voilà, ils me répondent en me demandant ça pour le mercredi matin, le dernier match des Bleus ayant lieu le mardi soir. Dès la fin d'un match qui restera dans les annales de Prozac comme un des plus vendeurs de son histoire, je file sur mon ordi pour mettre à jour mes stats sur les Bleus, ce qui prend quelques minutes. Je dois notamment modifier un truc : dans mes stats persos, toutes mes moyennes de points sont à la victoire à deux points, nettement plus significative puisqu'elle n'altère pas le rapport entre victoires et défaites (une équipe ayant autant de victoires que de défaites aura un point par match, sur deux), et non à trois. Mais comme toutes les compétitions de la terre sont désormais à trois, et que d'autres gens que moi vont lire ce papier, je convertis mes chiffres avec la victoire à 3 points... Pour moi ça les fausse, mais si ça plait aux gens...

Puis je m'attaque à mon papier, dont j'avais déjà les grandes idées en tête avant même que je ne le propose à mes employeurs : Benzema pas si fabuleux en Bleu que ça, invincibilité relative face à des adversaires de seconde zone, de plus en plus de joueurs de Ligue 1, etc. J'en trouverai d'autre en fouillant un peu dans mes bons vieux tableaux Excel - enfin c'est pas Excel, c'est un autre truc moins bien mais auquel j'ai du m'adapter après avoir récupéré un ordi non équipé de cette magnifique invention - qui ont révolutionné mon approche des stats - ben oui, avant les années 2000 je les faisais dans des cahiers, sur papier, à la main... -, j'en trouverai d'autres, encore plus intéressantes, comme le fait que les Bleus sont moins bons les années paires - celle des grandes compétitions - que lors des années impaires. Pas bon pour l'Euro ça !

Sa structure et ses grandes lignes déjà définies, mon papier est donc torché et relu en une heure environ. Un peu trop vite même peut-être, puisque le lendemain soir (donc hier), je renvoyais un mail pour rajouter une info : l'invincibilité des Bleus de Blanc (17 matches) est la même que celle connue au début de la mandature de Raymond Domenech en 2004-2005. Et vu que le prochain match se déroulera en Allemagne, qui vient de foutre une rouste aux Pays-Bas (3-0)... je crois que les compteurs risquent d'être assez vite remis à niveau.

Une fois terminé, je l'envoie (dans le corps du mail, ma version bizarre de Word n'arrive pas à être lu par les ordis bizarrement modernes présents au Figaro...), et dès le matin suivant, commence une longue attente. Je passe ma journée à checker une éventuelle parution, d'autres papiers tellement moins intéressants sur le sujet paraissent mais pas le mien. Je me dis alors que ce sera pour le lendemain, mais pour vérifier j'envoie encore un petit mail. Confirmation :

"Salut,

Oui on doit le mettre demain matin.


Merci il est très bien"


Hum oui bon voilà, c'est pas ce que je demandais, mais euh... bon, je prends quand même, allez. Comment on fait pour prendre ça modestement déjà ? Je sais pas, et ça m'ennuie en fait. Je kiffe.

Et puis voilà, ce matin au réveil, entre deux cuillerées de céréales Casino au chocolat, voilà mon papier non pas en une - il est devancé par un article sur Blanc et un autre sur le retour de Lisandro à Lyon... zzzz - mais en troisième position, suffisamment visible quand même à mon goût. Et puis les articles bougent régulièrement, la journée n'est pas terminée...

Difficile de comparer vu que je ne sais pas trop ce qu'est d'être père, mais j'ai un peu l'impression de voir mon gamin rentrer à l'école, et de le voir essayer de se faire sa place parmi ses camarades de classe. Je le vois aussi parfait qu'il ne l'est sans doute pas (trop de chiffres, sûrement rébarbatif pour cette raison...), mais je m'inquiète aussi pour lui. J'ai une boule au ventre quoi, c'est mon bébé. Sauf que dans trois jours, il aura disparu, ou presque... l'info est éphémère, je vous l'ai dit. Rendez-vous dans un mois et demi, pour la trêve de Ligue 1...

Je vous laisse.

lundi 20 juin 2011

Parti or not parti


Salut à tous,

Depuis des semaines, je me refuse à parler de l'affaire DSK, comme de l'affaire Tron. D'ailleurs, je déteste parler des affaires tant qu'elles ne sont pas jugées. Ça paraît évident dit comme ça, mais on ne peut pas dire que cet adage ait été respecté dans les médias, sur ces affaires comme sur d'autres.

Le problème, c'est de parler d'affaires sans prendre parti, tout en y mettant de l'émotion, involontairement ou pas, parce qu'on n'est pas des machines. Mais comme l'objectivité est une vue de l'esprit absolument utopique, à partir du moment où on aborde une affaire de ce genre, on donne forcément son avis. Pas forcément dans les mots d'ailleurs, ce sont souvent eux les plus faciles à contrôler. Non, je pense plutôt à des mimiques, des tournures de phrase, des silences, des choix de thèmes aussi. Et puis, parler des victimes PRESUMEES - un mot clé, s'il en est, depuis un mois et demi -, c'est forcément quitter la ligne droite qu'on avait décidé de suivre.

En plus de celles déjà évoquées plus haut, deux autres affaires m'ont interpellées aujourd'hui : celle de Colonna, qui clame son innocence mais qui a été condamné une troisième fois dans l'affaire Erignac, et celle de cet ouvrier agricole qui, lui, va sans doute être déclaré non coupable après avoir été condamné deux fois à une quinzaine d'années de prison pour le viol d'une jeune fille qui avait manifestement menti. Au point qu'on avait constaté, après qu'elle soit revenu sur ses déclarations, qu'elle était en fait vierge après son viol présumé... Et je ne parle pas de l’affaire Omar Raddad, remise au goût du jour par un film que je ne manquerais sous aucun prétexte.

Voyez-vous, l'affaire DSK a fait parler en un mois et demi à peu près autant de personne que l'existence de Dieu ou la poule et son œuf en 2000 ans. Y a d'abord ces amis, à qui on a reproché de l'avoir défendu dans un premier temps. Et là je ne parle pas des imbéciles comme Lang ou Kahn, et leurs dérapages manifestes. Je pense plutôt aux Strauss-Kahniens, dont je ne partage pas les idées libérales, comme Moscovici ou Cambadélis. Ca a choqué après coup, comme par exemple Ruquier qui n'a cessé d'en parler pendant des semaines à la radio. Mais si on vous annonçait, à vous, qu'un de vos meilleurs amis était accusé de viol dans un hôtel, vous ne le défendriez pas ? Vous y croiriez tout de suite ? "Quoi, Jean-Claude, un violeur ? Purée, c'était mon meilleur pote, mais au fond je l'ai toujours su ! Ordure, va te faire castrer chimiquement !" En tous cas, je ne pense pas que ma première réaction serait celle-là. Du moins je l'espère !

Ensuite, assez vite au fond, quelques jours plus tard, le temps que l'on digère les images hallucinantes d'un des hommes les plus puissants du monde mis au même niveau qu'un petit dealer du Queens ou qu'un méchant dans 24 - images d'autant plus choquantes qu'on y est pas du tout habitué, dans ce pays à la fois attaché (en principe) à la présomption d'innocence mais surtout au respect exagéré des élites et autres hommes de pouvoir... - , y a eu les autres. J'ai bien essayé de compter le nombre de fois que j'ai entendu la phrase "on a tendance à oublier qu'il y a aussi une victime", mais entre temps y a eu Roland Garros et la signature de Gameiro au PSG, et mon décompte s'est embrouillé aux alentours de 125 776. Et encore, je n'ai pas pu TOUT regarder tout le temps, j'ai du en oublier quelques centaines. Si des gens ont vraiment oublié qu'il y avait une victime, c'est que ce sont des bienheureux, vu qu'ils vivent manifestement dans la nature, dans des endroits extrêmement reculés, genre avec les Dogons sur les haut plateaux africains, ou au Pôle Sud par exemple.

Déclarer que Straus-Kahn est FORCEMENT innocent vu que ces amis ne l'imaginait pas capable de faire ça - en même temps, qui garderait sérieusement un ami soupçonnable de ce genre de crimes ? - , c'est tout aussi contraire à l'éthique que demande la Justice que de dire qu'il l'a FORCEMENT fait, vu que c'est une pauvre femme de ménage immigrée qui l'a dit, en accusant en plus un pervers notoire vu qu'il trompe souvent sa femme. Se sont donc ajoutés à cette affaire quelques poncifs et autres amalgames grossiers tels que "un homme infidèle est un pervers", "les hommes politiques sont tous des obsédés, surtout si en plus ils sont infidèles", ou "elle a forcément été manipulée par des ennemis politiques de DSK, vu qu'elle est noire et faible". Au passage, on a assisté au réveil des féministes, qui avaient auparavant effectué une bonne sieste au moment du débat sur les prostituées. Que celui qui n'a pas donné son avis sur cet affaire m'explique de suite sa présence devant un ordinateur, alors qu'il devrait être en train de renforcer sa hutte de bambou au Pakistan, en vu de la mousson.

Au final, si on essaie désespérément d'être objectif, je dirais qu'on a quand même surtout entendu ceux qui ne croient pas en son innocence - qui est encore possible, sinon autant économiser un procès et quelques mois de loyer mirobolants à Anne Sinclair -. C'est le problème du traitement des victimes. C'est complètement humain de prendre le parti du plus faible, surtout quand l'écart est aussi gigantesque. Même si je ne suis pas sûr que Nafissatou Diallo ait une chance de recueillir beaucoup de voix en cas de scrutin entre elle et lui. Quand on voit la veuve du préfet Erignac affirmer que justice à été faite après que Colonna ait été condamné une troisième fois, on espère qu'elle a raison, parce que vivre ce que l'ouvrier agricole accusé de viol, Omar Raddad ou Patrick Dils ont vécu en étant enfermé en prison durant des années alors qu'ils étaient innocent, je ne le souhaite à personne. DSK est sûrement coupable, mais il est peut-être innocent. Oui, il paraît que les complots politiques n'existent pas, si on excepte bien sûr le Watergate, l'affaire Baudis ou l’affaire Clearstream et autres joyeusetés de barbouzes de ce genre.

C'est toujours pareil avec l'émotion journalistique : on la pare de tous les attraits, mais c'est la meilleure façon de dire des conneries, et d'en faire aussi. Si DSK est innocenté, va y avoir un festival de vestes retournées, sans parler, évidemment, de ceux qui vont penser à un arrangement. C'est bien pour ça que quoiqu'il se passe désormais, DSK est foutu, il ne peut pas gagner, même s'il gagne.

Je vous laisse.

mercredi 18 mai 2011

Bouchon d'infos


Salut à tous,

J'hallucine complet, je plane grave, je suis sidéré. Jamais vu un truc pareil. Vous imaginiez, vous, que cette année 2011, qui s'annonçait aussi banale qu'un album de Michèle Torr, une année de transition qu'il allait bien falloir se taper pour aborder 2012, ses élections présidentielles en France et aux Etats-Unis, son Euro de foot et sa fin du monde, allait être aussi dense au niveau de l'info ? On se croirait sur l'A7 aux environs d'Avignon un 15 août. Ah y a des massacres en Syrie ? Faites la queue, comme tout le monde.

C'est ça, l'Histoire, c'est comme la Nature : elle fait ce qu'elle veut, détruit ce que l'homme a parfois mis des siècles à construire comme si ce n'était que de la poussière à épousseter d'un meuble, prenant ses convenances au mépris de tous les agendas médiatiques et politiques. Y avait rien de prévu de spécial non plus en 2001, lorsque Ben Laden a fait un strike à Manhattan, et l'Histoire humaine s'en est trouvée plus que chamboulée, carrément détournée. Sans le 11 septembre, pas de guerre de civilisations entre l'occident et le monde musulman (pas Arabe, Musulman), pas de montée des idéologies populistes de droite, pas de Bush, pas de Sarkozy... et pas d'Obama non plus, probablement. Bah oui, c'est l'histoire du Yin et du Yang : sans Bush, pas d'Obama. Espérons que ça se passe pareil en France...

On ne peut donc pas dire que depuis une bonne dizaine d'années, et l'avènement d'internet et l'explosion de l'offre médiatique, l'info ait pris du repos. Ces évènements, qui semblaient que survenir tous les 20 ans à l'époque où il fallait parfois des mois pour que les gens des campagnes apprennent, de la bouche d'un marchand ou d'un ménestrel, que le Roi venait de mourir ou qu'une guerre avait été déclarée, se succèdent de plus en plus vite, provoquant des embouteillages médiatiques nuisant à ceux qui ont le malheur d'être pauvres en image où en enjeux économiques. Suivez mon regard vers certains conflits et autres massacres africains. Les centaines de milliers de morts au Rwanda et peut-être, déjà, au Darfour, sont morts en vain et dans le silence le plus complet, ou presque.

Mais cette année, c'est le pompon. Comme si, désespérées par leurs inéluctables chutes vers l'anachronisme, la presse papier ou les médias traditionnels avaient signé un pacte avec l'Histoire pour redresser leurs chiffres d'affaires. Depuis le début de l'année 2011, la quasi totalité du monde arabe, Algérie, Maroc ou Arabie Saoudite exceptés, s'est révolté, parvenant, pour certains pays, à renverser leurs dictatures. Les autres sont depuis embourbées dans des conflits terriblement sanglants, et de moins en moins vendeurs médiatiquement. Il en est où Khadafi, quelqu'un le sait ? Et la rébellion à Misrata, elle est toujours là ? On sait pas, c'est tellement important de savoir ce que DSK a mangé hier soir dans sa cellule qu'on a oublié de regarder.

On était parti pour ne parler que de ça quand le Japon a sombré sous un tsunami puis une crise nucléaire. Même chose, quelles sont les chaînes qui en parlent encore ? A moins qu'ils aient réussi à la boucher, cette foutue fuite ? Deux secondes, je cherche l'heure à laquelle DSK peut se promener, et je vous dis ça. Ou pas. Y a eu Ben Laden, aussi, mais là ça a fait long-feu, parce que DSK. Et c'est vrai que je suis éberlué que tout le monde devant cette affaire, qui encourage toutes les facilités, du genre "s'ils le maintiennent comme ça en taule, c'est qu'ils ont quelque chose " (ok alors, économisons le procès et direct, 70 ans, hop affaire suivante !) ou "et la victime, bordel ?" (idem ! Appeler la plaignante "victime", c'est boucler l'affaire avant l'heure) ou encore "mais non, c'est pas un complot, c'est qu'au cinéma ça !" C'est vrai, y a jamais eu de complot de barbouzes dans l'histoire de la politique. JA-MAIS ! Et me parlez pas du watergate, Clearstream ou de l'affaire Markovic... c'est dans les bouquins d'histoire, donc ça existe pas vraiment. Ou plus vraiment.

C'est ça, l'info, c'est pas un éparpillement des infos, c'est une enfilade, dont celle de tête masque toutes les autres. De plus en plus de catastrophes naturelles, de plus en plus de révoltes et de conflits dans le monde, des caméras partout, y compris dans les téléphones, de plus en plus de chroniqueurs et de journalistes en herbe... la parole s'est libéralisée, démocratisée, et l'image s'est banalisée. Hormis, bien sûr, quand on voit, alors qu'on déguste tranquillement ses chocopops, un des plus puissants homme du monde sortir d'une prison entre deux malabars, les menottes au poings, la chemise défaite. Là, c'est tout sauf banal, mais il n'est pas impossible que ça le devienne. Comme quoi, le progrès, c'est pas automatique, on peut régresser aussi : les accusés défilant au milieu d'une foule avec des panneaux résumant leurs forfaits présumés avant même qu'ils soient jugés, ça se faisait déjà au Moyen-Âge.

Je vous laisse.