Salut à tous,
Encore un post inspiré d'un autre post lu ailleurs. Une copine nous parlait cette semaine d'un de ses anciens tortionnaires de collège, qu'elle a retrouvé par hasard lors d'une soirée, et avec qui elle discute et fraternise. Un type qu'elle surnommait "Goyle", en référence à un personnage particulièrement cruel d'Harry Potter, un des bras droits de Drago Malefoy. Ce qui constitue, selon moi, un véritable exploit. Je suis beaucoup moins enclin à pardonner et surtout à avoir du recul qu'elle.
Ce n'est pas que j'en ai bavé, non, finalement quand on y pense j'ai eu un avantage majeur pour passer l'obstacle du secondaire sans une baston, un tabassage ou quoi ou qu'est-ce : ma taille, puis mon tour de bide. Faut pas croire, les grands et costauds se font autant emmerder que les petits et maigres au collège et/ou au lycée. Mais pas de la même manière, c'est plus psychologique que physique. Ils sont gentils, mous et timides, mais ils sont mastoques : et les crétins des Alpes friands de têtes de turcs sont tout, sauf courageux. Ils pourraient se prendre une mandale par mégarde, et voir leur succès auprès du filles tout d'un coup nettement chuter.
Je me suis fait taper qu'une seule fois, c'était en primaire, et c'était une mandale à la loyale, face à face même si ça avait été une surprise complète, après qu'on se soit moqué d'un groupe de gamins qui avaient du poireauter une heure avant de manger à la cantine, ou un truc comme ça. Rien à voir avec le harcèlement physique ou moral qu'on peut régulièrement subir durant le secondaire. J'avais du tout de même me contenter de manger un yaourt avec une paille pendant au moins deux semaines après ça, il ne m'avait pas loupé... A 13 ans je faisais déjà près d'un mètre 70, je n'étais pas encore obèse mais la traversée du collège et du lycée allait grandement contribuer à changer tout ça.
Encore maintenant, j'ai du mal à me montrer vraiment méchant, agressif envers des gens qui le mériteraient pourtant. Je le suis avec les gens que je connais, en fait... mais ça vient du même endroit, d'une colère, d'un manque de confiance en moi, accumulés durant ces années où notre sens de la sociabilité se développe.
J'ai été contacté il y a quelques années sur copain d'avant par un de ces types qui me martyrisaient, au collège surtout. Le lycée, c'était plutôt cool finalement, parce que c'est là que j'ai commencé à me faire des amis. Le collège, je l'ai passé à raser les murs, à me raconter mes histoires tout seul dans mon coin, à l'opposé de celui des fumeurs, sans que ça ait un rapport avec leur pêché mignon. Disons que c'est d'une ironie savoureuse, vu que le meilleur moyen de sociabiliser finalement, c'était de fumer. Se donner un genre en recrachant la fumée d'une jet élégant, genre j'ai une opinion et je la partage, respirer l'air vicié près de ce mur grisâtre... quoi de mieux pour se faire un réseau, et éviter ainsi de se retrouver avec le bas de survêt baissé sur les chevilles en pleine cour de récré, ou être poussé de sa chaise en pleine classe ? Rien de méchant, pas de violence. Mais des moqueries, des petites humiliations, constamment, et absolument pas arbitrées par la seule autorité officielle dans ces endroits là, les profs et les surveillants. Le jour où j'ai exhibé mon slip à tout le collège à l'insu de mon plein gré, pas un d'entre eux n'a bougé. En revanche, ça a bien rigolé comme il faut, c'est beau des enfants heureux.
Bref, le type qui m'avait contacté, comme une fleur, comme s'il n'existait pas entre nous un dossier plein de merde, m'avait présenté sa famille, "salut j'habite en Normandie, j'ai deux filles tout ça", je l'ai envoyé paître, sans entrer dans les détails, comme j'aurais du le faire dix-quinze ans plus tôt. Il était sûrement sincère : ces types là n'ont pas conscience d'avoir pourri la vie à des dizaines de gamins, juste pour être populaire, pour faire rire les filles qui ne s'en privaient évidemment pas. Mieux vaut être copine du patron de la cour que de sa tête de turc... c'est pas comme dans les films, y en a pas eu une qui a été attristée par mon sort ou celui d'autres pauvres types pas assez forts mentalement pour s'en sortir. Du moins au collège. Au lycée, les demi baguettes au Nutella, les sandwiches au camembert et les tablettes de chocolat avalées au goûter ou la nuit avaient fait de moi l'homme que je suis, quelqu'un dont on se moque assez facilement, mais pas devant lui, on ne sait jamais. Ils ont tort d'ailleurs, y a peu de chance que je réagisse brutalement. Du coup, le lycée, ça a été. Et puis comme je ne redoublais pas, contrairement aux "bullies" du collège, ben du coup j'étais débarrassé d'eux à l'étape suivante... j'ai redoublé au lycée en revanche, mais ils ne m'ont pas rattrapé, bizarrement...
Cette période du collège a forgé en moins une méfiance terrible envers l'Humanité, mue par la loi du plus fort, de celui qui parle plus fort que les autres, la capacité extrême de l'homme à écraser systématiquement celui qui sait moins s'exprimer que les autres, le plus faible. Une haine, surtout, du panurgisme, cette tendance à être du côté du plus fort, comme ces petits arbres qui poussent à côté du plus grand, ce suivisme dans tous les domaines, social, artistique... ah y a un programme télé qui marche bien, alors on va le regarder... vous pouvez remplacer "programme télé" par "disque", "film", "homme politique", et "regarder" par "soutenir", ou "produire"... suffit qu'un type avec un peu de bagout sorte une ânerie à la télé, et il devient un leader d'opinion qu'il a pourtant lui-même créé au moment même où il disait sa connerie.
Tout cela n'est pas bien raisonnable, je sais que je devrais pardonner et aller vers ces gens qui n'ont probablement pas eu une vie meilleure que la mienne, vu que je ne peux malgré tout pas considérer que j'ai été malheureux dans ma vie. Je n'ai manqué de rien, j'ai étudié, je fais à peu près ce que j'aime, j'ai une copine géniale, des amis frappadingues, je voyage... mais si je croisais ces types, je leur sortirais ce qu'il y a de plus efficace et plus douloureux dans ces moments là, plus que l'agressivité ou les larmes : l'indifférence. Je sais, ce n'est pas raisonnable, je l'ai dis, mais en même temps je n'ai jamais dis que je l'étais raisonnable. Mon but dans la vie, ce n'est pas d'avoir ou de m'inventer des qualités, histoire d'être quelqu'un de parfait. Je préfère assumer mes défauts, ce qui me permet de mieux encaisser les critiques des autres que mon mauvais caractère pourrait le faire.
Je vous laisse !
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