mardi 6 novembre 2012

Sixty years

Salut à tous,

Comment ça va bien ? Moi ça va nickel, si on excepte le froid et l'approche de Noël, merci de demander !

Comme un vulgaire jeunot, je viens de passer mes deux derniers week-ends hors de chez moi. Laissez-moi vous raconter le premier d'entre eux, celui en huit comme on dit, avant que je ne vous raconte, peut-être, le second.

Il s'agissait de revenir dans le village yvelinois de mon enfance, mon adolescence et le début de ma vie d'adulte, Issou, situé entre Meulan et Mantes, si on regarde largement, pour y fêter les 60 ans de mon papa et de ma tante, qui, comme vous l'avez très certainement deviné, sont jumeaux. Les fêtes familiales, c'est aussi l'occasion, trop rare à mon goût, de revoir les membres de ma famille, tels que mes parents évidemment, mes trois frères, mon cousin, ma cousine, les cousins des cousins, les amis de la famille... bref, rebrancher, même temporairement, la lampe à nostalgie, pour revoir tous ces visages qui ont constitué ma vie quasi quotidiennement pendant plus de 20 ans, voire plus.

Pour mon Amour et moi, lorsqu'on va dans cette direction, on a deux solutions : soit aller directement à Issou en train, ce qui constitue un voyage long et fastidieux, qui passe par un changement tout aussi long et fastidieux par la guillerette gare de Conflans-Fin d'Oise, par laquelle j'ai transité pendant des années pour aller à la fac de Nanterre, soit aller à Poissy, beaucoup moins loin de chez moi, et que quelqu'un ait la grande bonté de venir nous chercher. Des problèmes de train - extrêmement fréquents depuis la rentrée, en partie en raison d'un nombre important de suicides, et je ne blague même pas - nous privant d'un trajet à Mantes, je suis contraint de demander à mon cousin, A., s'il peut venir nous chercher à Poissy, ce qu'il accepte volontiers.

Voyez-vous, si je devais trouver quelqu'un qui aime plus conduire que moi, ce serait lui, et pour cause : c'est son métier depuis qu'il travaille, ou presque. D'abord comme représentant pour une célèbre boîte de Roquefort, habitué à rouler sur les petites ou grandes routes de province, et maintenant comme... moniteur de stage de voitures de course, vous savez, ces cadeaux qu'on offre à nos papas quand ils sont fans d'automobile, genre conduire une Ferrari sur un circuit, etc. Et bien mon cousin, après un an d'apprentissage, il va faire ça comme métier, et c'est peu dire qu'il kiffe déjà à l'avance, lui qui est mordu de belles voitures depuis toujours. On peut donc considérer qu'un petit aller-retour Porcheville-Poissy un samedi après-midi, ça ne le dérange pas vraiment : toutes les
occasions sont bonnes pour conduire. Je ne vous cache pas que, même si je n'y connais absolument rien en voiture, je partage avec lui l'amour de la conduite. Pas forcément rapide, mais tracer la route, c'est quelque chose qui me fera toujours triper. Et qui ne cesse de me manquer depuis que ma santé financière m'interdit littéralement de posséder une voiture.

Il fait froid, gris et humide face au buste de Pompidou qui orne le parvis de la gare de Poissy, et nous nous attendons à voire débarquer A. au volant d'une de ses voitures pas forcément rutilantes, mais racées et élégantes qu'il chéri d'ordinaire. C'est donc avec un amusement non dissimulé - et partagé avec lui-même, bien conscient du comique de la situation - que nous le voyons arriver dans un pot de yaourt noir et informe, dans lequel je voyagerais le menton coincé entre les genoux, fruit d'un emprunt imposé par la présence de son véhicule habituel au garage. Ne me demandez pas le marque, c'est le genre d'information qui fait la jonction entre mes deux oreilles, sans passer par le cerveau, à vitesse lumière. Ça ne l'empêchera pas de pousser sa voiture d'un jour à plus de 100 à l'heure sur les petites routes de campagne qu'il emprunta pour éviter les départs en vacances encombrant logiquement l'autoroute A13 un samedi après-midi. Déformation professionnelle...

Malgré la démonstration que s'il peut pousser une voiture aussi pourrave à plus de 100 en quelques secondes, il peut faire des merveilles avec un véhicule créé pour ça, on arrive malgré tout en un seul morceau à Porcheville, chez ses parents - mon oncle et ma tante, donc - , où nous attendent sa
femme et son fils, "vieux" de six mois. Un petit bout adorable, un de plus, rejoignant la garnison de mioches délicieux qui embellissent mon quotidien depuis un dizaine d'années maintenant. Pas farouche, et aimant balancer par terre son doudou pour faire criser son jeune papa, qui me rend quand même 10 années pile.

Après cette jolie visite, direction la salle des fêtes où se déroulera la nouba, à à peine une centaine de mètres à vol d'oiseau de ma maison d'enfance, aujourd'hui occupée par des inconnus. Cette salle des fêtes assez moche et quelconque fit longtemps partie de la vue que m'offrait ma fenêtre d'enfant, avant qu'une autre salle de fête, celle-ci d'une laideur absolument infâme et d'une taille telle qu'elle bouchait quasi intégralement ma vue, hormis le bout de la rue avec le stade, en me tordant la tête vers la gauche, vint définitivement gâcher mes séjours quotidiens à ma fenêtre. Plutôt rester assis dans ma chambre à regarder la télé ou dessiner que jeter un œil dehors, et voir l'énorme dinosaure de béton me regarder avec l'air de dire que si je n'étais pas content, j'avais qu'à baisser le store. Ce que je faisais, en général.

A notre arrivée à la salle de fêtes - la première, celle dans laquelle j'ai malgré tout de jolis souvenirs enfantins de fêtes - je constate que le stade a été baptisé "complexe Colette Besson", et que la salle, elle, a été pompeusement nommée "salle Sidonie Collette". Aucun lien, mais j'ai trouvé la concordance des noms assez savoureuse. Comme si on avait appelé un jardin "Lambert Wilson", et la fontaine qui l'orne, "Christophe Lambert". Bref, une sacrée promotion pour un cube de taule et de béton, mais après tout pourquoi pas ! C'est toujours mieux que "salle Dany Brillant" ou "salle Brice Lalonde". En plus ça me permet d'apprendre le prénom de Colette, ce qui n'était pas prévu au départ de cette expédition.

Ca me fait penser que quand j'étais gosse, mon école se nommait "Ferdinand Famy", et du haut de ma petite culture à faire, je croyais logiquement que ce monsieur était terriblement célèbre, vu qu'il avait une école à lui, comme lorsque en colonie, lorsque les autres mioches me demandaient où j'habitais, je disais "Issou, à côté de Gargenville", comme si cette précision géographique suffisait à indiquer mon lieu de résidence à n'importe quel gosse de la Terre. Issou, c'était forcément pas connu, mais Gargenville, oui, évidemment. C'était tellement plus grand... En fait, Ferdinand Famy était un maire d'Issou dont la longévité a évidemment bien mérité que son nom figurât sur le fronton de la jolie école de son village. Mais dont la notoriété particulièrement locale ne permet que de retrouver de vieilles photos de classe lorsqu'on tape son nom dans Google... et même pas les miennes en plus, quelle déception.

On entre dans la salle vers 16h, elle est déjà quasiment prête pour nos libations. Malgré tout, mes parents, ma tante, mon oncle et quelques amis proches y sont encore très actifs. Nous claquons quelques bises, constatant avec plaisir que le temps ne semble pas vraiment avoir de prise sur la génération précédente, ainsi que sur la mienne. Malgré la rareté de nos retrouvailles, ils ne semblent pas changer, et c'est tant mieux. A noter que les "seniors" gardent plus facilement leurs cheveux que leurs gamins. Ça, faudra m'expliquer à quel moment ça a merdé !

Une fois ces embrassades effectuées, je pique la voiture de mes parents pour aller rendre visite à ma grand-mère, hospitalisée à Mantes pour un AVC, et du coup privée de l'anniversaire de ses enfants. Déjà qu'elle n'était plus un monstre d'optimisme depuis la mort de mon grand-père, il y a quelques années maintenant, mais là je peux comprendre que son moral ne soit pas très bon, après un tel coup du sort. Je la retrouve dans une forme physique supérieure à ce que je m'attendais, c'est-à-dire pas extraordinaire mais ça va quand même à peu près, mais le moral est à zéro, surtout que ses enfants, après être venus tous les jours la voir, ne peuvent pas venir aujourd'hui en raison de la préparation de la fête, même si mon père ira la voir un peu avant quand même.

Je repars une demi-heure plus tard, le moral dans les chaussures, et bien loin d'avoir envie de mettre une cravate à paillettes pour respecter le "dress code" de la fête : les années Disco. Les hôpitaux, c'est rarement la fête à neuneu, et les infirmières ressemblent rarement à Katherine Heigl, en plus, même si leur boulot est d'une dureté parfois terrible. Tenir compagnie à ma grand-mère, alors que cette dernière est privée des 60 ans de ses enfants... ça n'a pas du être une sinécure.

Retour à la salle, où nous ne restons pas longtemps. Nous allons nous préparer chez ma cousine, qui vient d'acheter, avec son mari et ses deux fils, une grande maison dont ils aménagent l'étage pour que leurs deux gosses puissent jouir de deux belles chambres dans les années à venir. C'est drôle, parce que cette maison figure sur mon trajet historique pour aller acheter le journal et ses cigarettes à mon père, quand j'étais môme (oui, le vendeur du tabac local acceptait de vendre une cartouche entière de Gauloises sans filtres à un môme, c'est ça les villages où tout le monde se connait...). Elle se situe également à un jet de pierre de la maison de mon ami d'enfance, Cyril, que je n'ai pas revu depuis... au moins 10, voire 15 ans. Voire plus. Il n'empêche qu'à l'époque, je passais mon temps à jouer avec lui, devant chez moi ou devant chez lui. Je connais donc cette maison, sans la connaître, puisqu'elle a toujours été cachée par une immense haie, qui m'a toujours fasciné. Il a fallu que ma cousine achète cette maison pour que je sache enfin, 25 ans après, à quoi elle ressemblait, de l'extérieur et de l'intérieur...

Il y aura quelques jolis déguisements d'adulte, mais les meilleurs auront été ceux des enfants de mon
cousin, et notamment du premier d'entre eux, H., parfaitement grimé en Michael Jackson. Bon c'est celui des années 80, de l'album Bad, pas celui des 70's, mais on ne va pas chipoter... il est parfait, à part bien sûr que pour lui, Michael Jackson, c'est comme Tino Rossi pour nous, vous voyez. Un dinosaure, quelqu'un d'un autre siècle. D'ailleurs, notre demande de chanson restera vaine, mais pas notre demande de moonwalk, parfaitement exécuté...

J'ai mis ma chemise - j'adore autant ça que de faire des courses de Noël, vous imaginez - et ma cravate bleue à paillettes, confectionnées par les soins de mon Amour mais qui, sur les photos, me fera plus penser au foulard de scout de Patrick Juvet qu'à autre chose. M'enfin bon, c'est pas grave, j'ai pas trouvé mieux :p

Direction la fête à présent, cette fois on y va à pied, c'est à deux pas. Nous arrivons dans les premiers, et ce sera donc à nous de recevoir patiemment les bises et autres poignées de main des arrivants. Au fur et à mesure, les 70 invités se dispatchent le long des la grande table en U, dont le sommet côtoie une estrade, où du matos de DJ attends son maître. Tout cela embelli de ballons, de guirlandes, etc. Les enfants jouent déjà activement dans le creux du U, là ou aucun adulte ne s'aventurera vraiment avant de danser, s'amusent avec les ballons de baudruche et, déjà, quelques verres tombent. Comment le leur reprocher alors que, 25 ans plus tôt, nous étions à leur place, à jouer entre nous en attendant que ces lambins d'adultes, si bavards, daignent lancer l'appel à la soupe ? Si un gamin ne peut pas faire de bêtises quand il est gosse, quand peut-il en faire ?

Toute mon enfance, toute ma jeunesse défile devant moi. Ma famille, les amis de ma famille, quelques inconnus aussi... enfin jamais complètement inconnus, souvent des visages croisés dans les rues d'Issou ou à des fêtes diverses. Mon père a même réussi à faire venir ses nouveaux voisins bretons ! Eux, ça faisait VRAIMENT bizarre de les voir là, c'est quand même une belle marque d'amitié. Les seuls visages que je ne connais pas, finalement, sont ceux de certains gamins. On discute, on prend des nouvelles, mais je n'apprends pas grand chose de neuf, à part de nouvelles paternités, inévitables. Si y a un truc sur lequel la France restera encore longtemps compétitive, en Europe notamment, c'est bien sa démographie et sa natalité.

Après cette bonne heure, on s’assoit enfin à table. Les "jeunes" - quasiment que des trentenaires, une table de "vrais" jeunes, avec les gamins, ayant été installée à part, près de l'estrade, avec les plus vieux d'entre eux en charge de la discipline, je le sais, j'ai été à leur place, il y a rien de plus pénible que de passer pour le méchant pour les plus petits - s'installent inconsciemment entre eux, dans le creux du U, face à l'estrade. Mes parents et leurs amis "historiques" se placent à ma droite, alors que les proches de ma tante, eux, vont plutôt à ma gauche. Sans placement à l'avance, les clans se constituent logiquement, mais est-ce un mal finalement ? Au moins on n'a pas du subir le temps d'adaptation et de jaugeage de ses voisins classique des mariages. La soirée est partie assez vite finalement, et tout
le monde se connait quand même pas mal.

Au menu (j'espère ne pas me tromper, je me goure souvent dans cet exercice) : poulet et riz, servi avec une sauce à la crème fraiche et au Calva à tomber par terre de bonheur. Sans parler des gâteaux, à tomber. Moi qui essaie de faire attention en ce moment, je n'ai pas réussi à me retenir de me resservir. Pourtant c'était assez classique, pas vraiment un menu sophistiqué ou concept, juste un menu simple, efficace et bon. Un peu gras, mais bon, à la bonne franquette. Et les assiettes étaient remplies généreusement, c'était la fête quoi, merde ! Que mes amis parisiens et nantais me pardonnent, mais ça me changeait un peu quand même :p Un retour aux sources, en quelques sortes.

Sur les tables, sont disposés des fils de scoubidous, ce qui va m'occuper les mains durant des heures. Ah, le scoubidou... encore une résurgence de ma jeunesse. Et puis faire un scoubidou, c'est comme faire du vélo, ça ne s'oublie pas. Et, hormis un claquage de la main, c'est un peu moins risqué comme sport. Mon père distribuera également une rose à chaque femme de l'assemblée. C'est son truc, ça vient sûrement de son côté pakistanais... il n'empêche, la rose offerte à mon Amour est toujours là, à me regarder du haut de son vase en train de taper ce post...
Sur l'estrade, se succèdent des intervenants divers et variés. D'abord ma tante et mon père, qui nous servent un long discours sympathique, des remerciements, etc. Un coucou à ma grand-mère, aussi, même en son absence. Les amis de mon père leur ont également réservé quelques surprises, notamment une chorale mais aussi, tellement plus marrant, une parodie de YMCA par les Village People. Franchement, ça, c'était hilarant, on sent qu'ils avaient bien répété leur truc... ça donne envie de faire pareil !

Suit un blind test sur les années 70 servi par le DJ, pas facile facile d'ailleurs, qui sert surtout de prétexte à lancer les premiers danseurs sur la piste.
Nous, trentenaires narquois et un peu crétins - on est là pour se marrer, ou quoi ? - taquinons les "quinquas" et "sextas" se trémoussant comme à leurs plus belles années pompidoliennes, sur du Patrick Hernandez, du Boney M et sur du Gilbert Montagné. Sans parler de la sacro sainté chenille... sur du Gilbert Montagné. Ah ça, ils ont encore quelques leçons à nous donner les vieux...

Moi je n'ai pas bougé, hormis sur un slow, occupé que j'étais par mon scoubidou, et à discuter et me marrer avec mes frangins,mon cousin et ma cousine, et les vieux potes d'Issou. Surtout ceux de mes frangins d'ailleurs, ceux que j'avais - il étaient peu nombreux déjà à l'époque, mais quand même - faisant tous défaut. Malgré le
peu d'écart entre les générations - la mienne, celle de mon premier frère (trois ans) et celle de mon deuxième frère (deux ans) - on constate une grande différence d'attachement et de destins. Dans ma génération, tous sont partis d'Issou, parfois assez loin même. Alors que les plus jeunes sont tous là, quasiment aucun ne manque à l'appel ! Une fois de plus, je suis donc le vétéran de cette génération...

Deux heures du mat, trois heures, les premiers départs sont constatés, et on ne fera pas long feu non plus. Nous irons dormir à Mantes, chez mon deuxième frère, J., qui lui ira dormir chez ses potes... tout est sympa dans cet appart, sa taille, le synthé avec les partitions dessus, et même la vue immédiate sur le cimetière, ce qui dégage la vue, et pour longtemps :p Il n'est pas près de voir un immeuble venir se construire devant sa fenêtre... et je ne
parle pas de sa localisation, à deux pas de la gare, ce qui nous arrange grandement... mais avant de repartir ce dimanche matin, nous filons dire au revoir à la salle, où un "retour" se prépare. Bossant à 15h, je ne peux pas vraiment y participer, mais je prends quand même le temps de manger un peu, et d'assister de justesse à la distribution des cadeaux. De notre part : des bougies pour ma tante, un journal de sa naissance à mon père, déniché dans l'exceptionnelle petite boutique située aux Halles, près de la Rue de Rivoli.

Et puis voilà, mon frère nous ramène à la gare. J'ai longtemps détesté la nostalgie, mais j'avoue que ça a des côtés sympathiques quand même. Malgré tout ce qui se passe dans ma vie, je sais que ma famille, tous ces visages, resteront là comme un socle, de quoi voir venir malgré tout. Faut quand même que je les revois plus souvent, tous autant qu'ils sont.

Je vous laisse avec d'autres photos...




3 commentaires:

Manue a dit…

C'est chouette la nostalgie, ça te fait écrire des beaux textes :) :x

Mona a dit…

" ces cadeaux qu'on offre à nos papa" alors moi je l'ai offert deux fois et deux fois à des "mamans" ;) .... ;)



Rue de l'arbre sec, si tu sais plus pour la librairie :)

Merci de ce compte rendu !

Gildas Devos a dit…

Si si je savais ! Merci !