samedi 6 novembre 2010

Analyse contre prétention


Salut à tous,

Comme vous le savez, je suis un lecteur assidu de l'Equipe, quotidien sportif quasi exclusif en France. Je suis évidemment de ceux qui voudrait d'autres offres, à l'image des grands pays de sports que sont l'Espagne ou l'Italie, notamment, mais les tentatives depuis 20 ans sont tellement navrantes que finalement, je me demande si c'est vraiment souhaitable. La crise de la presse écrite et les méfaits des obligations économiques font qu'aujourd'hui il est impossible d'imaginer créer un nouveau journal sans céder d'entrée aux facilités que sont le populisme, le sensationnalisme et autres mots en isme particulièrement efficaces pour vendre du papier. Sauf qu'en fait ça ne marche pas non plus, donc peut-être que la prochaine fois ils devraient essayer de privilégier le fond avant la forme, comme ne pas mettre un Zidane en une alors qu'il a aucune actu, juste pour faire vendre le numéro 1.

Donc l'Equipe est tout seul, alors il en profite, normal. J'ai déjà parlé ici de sa manie de vouloir chercher la petite bête là où y en a pas, parce que lui aussi a des problèmes de ventes. Ce qui me fascine, et je ne suis d'ailleurs pas sûr que ça lui soit exclusif, c'est comment ce journal reporte ses interviews, ses déclas. Il y a les interviews classiques, où il a une marge limitée pour influencer le lecteur puisqu'il est censé retranscrire intégralement l'entretien entre le journaliste et son interlocuteur. Et puis y a les déclas incluses dans des articles, et là c'est la fête.

Imaginez un entraîneur qui affirme un truc. Genre par exemple, il dit : "j'ai de bonnes relations avec mon groupe, qui travaille bien". Une phrase bâteau, qui ressemble furieusement à de la langue de bois. Pour les journalistes, faire de la langue de bois c'est ne pas leur raconter les embrouilles existant dans un groupe, alors que eux, si on leur demandait de raconter les leurs, d'embrouilles, et elles sont aussi présentes, sinon plus, dans une rédaction que dans un groupe professionnel, ils refuseraient. Bref, toujours est-il que ce qu'il dit est peut-être gnagnan, mais c'est peut-être aussi vrai ! Quoi, ça n'existe pas un groupe qui s'entend bien ? Bref, peu importe.

C'est là qu'on voit les a priori d'un journaliste ressortir au grand jour, même si on s'en aperçoit rarement, parce qu'on n'y fait pas attention, on lit et puis voilà. Mais, après qu'il ait reporté la phrase de l'entraîneur dans son article, il a le choix : il peut mettre "analyse-t-il" (là il est à la bonne, Blanc y a droit une décla sur deux), "affirme-t-il", "soutient-il" (déjà on sent un doute), ou carrément... "prétend-il". Et là, ça change tout, comme dirait l'autre. "J'ai de bonnes relations avec mon groupe, qui travaille bien", prétend-il, le journaliste, et avec lui ses lecteurs, qui, pris dans leur lecture, ont autre chose à faire qu'analyser en profondeur son papier, moi le premier, se mettent définitivement dans le camp de ceux qui ne croient pas ce que raconte cet entraîneur. Alors qu'il aurait mis "analyse-t-il", et là on sent une volonté quasi nulle de chercher des noises à son interviewé. Et là, on est loin de la transmission pure, déontologique et objective de l'information. Il y a là un traitement, une déformation, un distorsion de la réalité, une affirmation carrément pas neutre de la part du journaliste, tout en faisant tout pour faire croire le contraire.

C'est pas grand chose, mais ça change tout. Si Domenech avait eu ne serait-ce que, allez, 10 % des journalistes dans sa poche, il s'en serait sorti. Mais il n'a jamais voulu leur faire de cadeaux, et ils lui ont fait payer cher cette rébellion, à coup de "prétend-il" notamment, le faisant passer pour un incompétent total. Aujourd'hui, il y a des gens qui trouvent que ça va mieux avec Blanc parce que les Bleus sont en tête de leur groupe de qualification. rappelons que Domenech a TOUJOURS qualifié l'Équipe de France, trois fois sur trois, en ne perdant jamais à domicile face à des équipes comme la Biélorussie...

De même, on accorde à Blanc des circonstances atténuantes, comme le fait qu'il doive reconstruire, ce qui était déjà la tâche de Domenech en 2004, puis en 2006, après les deux départs de Zidane. Sauf que dès que c'est allé mal, en 2005, on a réclamé le retour des anciens. Et depuis 2006, jamais on a évoqué le fait que Ray ait eu à reconstruire un groupe avec des joueurs plus jeunes. Mais ne comptons pas trop sur la presse pour rétablir la vérité. J'espère que Ray va faire cracher la Fédé bien comme il faut, puisqu'il ne peut rien faire contre les journalistes.

Je vous laisse.

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