vendredi 26 août 2011

I comme Icare


Salut à tous,

Cette nuit, après avoir regardé "Meurs un autre jour", un des James Bond médiocres tournés avec le pire qui fut, Pierce Brosnan, mais que je n'avais jamais vu, je suis tombé sur un classique des années 70, un polar comme j'aime, "I comme Icare", avec Yves Montand. Une petite perle dénuée de la moindre petite scène d'action mais au scenario et à l'écriture soignée, une histoire qui fait frémir et réfléchir, inspirée du meurtre de Kennedy. Bref, merci les chaînes du câble, même si le nom de celle qui diffusait le film m'a échappé...

Donc là encore on a droit à un assassinat de président, et le meurtrier, retrouvé mort dans l'immeuble d'où il est sensé avoir tiré, est vite classé dans la catégorie des fous, qui aurait agi seul. Forcément, ce n'est pas le cas, sinon le film se serait terminé au bout de 10 minutes, avouez que ça aurait été dommage, surtout pour la scène finale. Celle où... bon je vous raconte pas, mais je vous conseille de le regarder, s'il repasse un de ses jours.

Si je vous parle de ce film, en plus de vous le conseiller et de remercier ma Neufbox de me fournir toutes ces chaînes riches en films de ce genre, c'est pour une scène spécifique. Pour analyser le profil du tueur présumé, le procureur, joué donc par l'excellent Yves Montand, se rend dans une fac pour assister à une expérience qui m'en a rappelé une autre. Il y a quelques temps, peut-être l'année dernière, le service public avait diffusé une émission sur une autre émission, bidon, où des candidats devaient répondre à des questions. A chaque mauvaise réponse, une personne, qui était enfermée, recevait des décharges électriques de plus en plus forte. Bien sûr, les décharges sont fausses, la personne "torturée" est un acteur et réclame pourtant qu'on arrête ce jeu, ce qui n'empêche pas les candidats de continuer à lui envoyer des décharges. Cette émission avait fait scandale, mais le résultat m'avait tout de même sidéré.




Cette expérience, nommée "Expérience de Milgram" (merci Google) démontre qu'à partir du moment où un ordre, même cruel, vient d'une entité supérieure, une large majorité (62 % !) de personnes sont capables de le respecter jusqu'à une limite extrêmement importante. Ainsi, dans le film, qui s'est inspiré de la véritable expérience, l'homme qui torture ne se révolte pas avant le seuil de 450 volts, portant même la responsabilité sur le pauvre type sur la chaise électrique !

Le médecin explique alors à Montand que les dictatures fonctionneront toujours grâce à la "fragmentation" de la cruauté. Si chacun à une petite tâche à respecter, et qu'il la réalise, tant que c'est un ordre venu du dessus il le fera, parce que l'individu aura la sensation que ce n'est pas de sa responsabilité. Certains devront arrêter certaines personnes : ce sera leur tâche. D'autres devront les emmener dans des camps, d'autres rédigeront des listes, des tracts, etc. Hormis quelques monstres, en bout de chaîne, personne ne se sentira vraiment coupable, car les gens diront qu'ils obéissaient à un ordre et que ce qu'ils faisaient n'était pas méchant... C'est comme ça que les dictatures sont florissantes, encore aujourd'hui : non pas en s'appuyant sur une élite militarisée contre un peuple opprimé, mais en s'appuyant sur un peuple obéissant et fuyant toute notion de responsabilité individuelle, colaborrant même sans discuter. Combien de fonctionnaires de Vichy ou du Reich ont été arrêtés et jugés après la Guerre ? Pas des masses a priori, c'est plutôt les têtes pensantes qui l'ont été, logiquement bien sûr.

Bref, le devoir de désobéissance existe toujours, mais n'est jamais autant justifié aux yeux de l'histoire que quand son camp l'emporte. Sinon, c'est juste de la rébellion, du terrorisme.

Je vous laisse.

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